"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
dimanche 22 novembre 2009
Réforme du lycée : exigeons son retrait !
La réforme du lycée est une contre-réforme de grande ampleur qui s’inscrit dans le cadre des politiques libérales visant à remodeler l’ensemble du système éducatif. Elle n’est pas acceptable.
Elle s’inscrit pleinement dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP) dans la mesure où elle a pour but des économies de moyen considérables et constitue une adaptation du lycée aux suppressions de postes que l’Education nationale a connu depuis plusieurs années et connaît encore.
Dans ce cadre, la réforme du lycée prévoit de nombreuses réductions horaires et une réorganisation des années de Première et de Terminale : l’année de Terminale serait désormais consacrée essentiellement aux enseignements de spécialité (physique / chimie et SVT en filière scientifique…) tandis que l’année de Première serait dévolue aux enseignements « de tronc commun » (français, histoire / géo, maths, langues…) dont l’évaluation au bac se ferait à son issue. Cette réorganisation permettra de supprimer de nombreuses heures de cours.
Le redoublement devra désormais être exceptionnel : quelle que soit l’appréciation que l’on porte sur son efficacité actuelle, il est certain que cette mesure s’accompagnera d’une multiplication des réorientations forcées, en particulier en fin de classe de Seconde. Combien d’élèves de Terminale ayant échoué au bac ne trouvent d’ores et déjà pas d’établissements qui acceptent de les réinscrire ?
La suppression des personnels d’orientation (COPsy) est actée et les tâches d’orientation sont confiées essentiellement à des enseignants qui deviendraient les « tuteurs » d’élèves pendant toute leur scolarité au lycée.
La réforme des lycées consacre en outre une hiérarchie des filières qu’elle accentue encore, en contradiction avec l’affichage qu’on lui donne. La filière S est renforcée. La volonté de valoriser la filière L est affirmée, sans que les mesures proposées permettent de voir comment. En revanche, la filière ES est victime d’attaques idéologiques au prétexte que les enseignants de SES parleraient trop de sociologie et trop peu de l’entreprise, en des termes insuffisamment laudateurs… Au-delà, l’enjeu est politique : la filière ES accueille aujourd’hui un public d’origines sociales très différentes, elle réussit par conséquent à lutter contre la reproduction des inégalités sociales et fournit à ses lycéens une culture, des méthodes de travail et un sens critique qui en font les plus à même d’affronter les difficultés de l’Université.
Cette réforme prévoit la possibilité d’une réorientation des élèves d’une filière à une autre en fin de classe de Première, par le biais de « classes passerelles ». Mais cette réorientation ne sera possible que dans le cas d’échecs scolaires constatés et non par la volonté d’un élève. Par conséquent, il s’agit en réalité de renforcer encore une fois la hiérarchisation des filières en évinçant les élèves indésirables des sections privilégiées à la fin de l’année de Première.
Cette réforme consacre donc un éclatement du lycée, qui sera de moins en moins lisible pour ses élèves, où il sera de plus en plus difficile de se repérer. Dans ce cadre, seuls les plus informés s’en sortiront, accentuant de fait les inégalités et les ségrégations sociales.
Cette réforme, au prétexte d’autonomie des établissements, renvoie vers le local la plupart des arbitrages douloureux. Il s’agit là de renforcer les potentats locaux des chefs d’établissement et de provoquer un morcellement des mobilisations.
La seule proposition pour lutter contre l’échec scolaire réside, comme dans le primaire et au collège, dans la mise en place de mesures de soutien individuel dans le cadre d’un accompagnement éducatif, prévu deux heures par semaine. Cet accompagnement éducatif ne constitue pas une solution réelle aux difficultés scolaires. Il se substitue aux cours, puisque les heures d’accompagnement éducatif seront inscrites à l’emploi du temps des enseignants et les Conseils d’Administration devront arbitrer quelles heures disciplinaires ils souhaitent supprimer en compensation de ces deux heures de soutien. Il s’agit surtout d’amener l’élève en grande difficulté à se sentir individuellement responsable de son échec. Ainsi, le tour est joué : le système se disculpe en accordant à ces élèves quelques heures de soutien et pourra désormais affirmer que les « perdants » n’auront pas fait ce qu’il faut pour réussir.
Enfin, la réforme des lycées prévoit l’organisation régulière de stages de vacances pour les élèves, dans les domaines des langues ou de l’orientation par exemple, et prétend faire des lycées des « lieux de vie » qui soient ouverts aux lycéens bien au-delà des heures de cours. C’est une imposture ! Derrière l’affichage du lycée « lieu de vie », il s’agit là de réduire les lycéens à l’état de consommateurs qui se rendraient au lycée – centre commercial et iraient en cours ou en stage pour remplir leur chariot. Ce ne sont en rien des lieux de vie autogérés qui favoriseraient l’épanouissement des élèves, permettraient des rencontres et la construction d’un projet scolaire cohérent.
Au final, cette contre-réforme ne permet en aucune manière de lutter contre les inégalités sociales, elle renforce la hiérarchie des filières et ne permet pas d’avancer vers la démocratisation nécessaire du lycée. Elle ne peut se négocier : il faudra arracher son retrait par la lutte.
Dès lors, nous souhaitons la tenue d’un grand débat citoyen, rassemblant les personnel-le-s, les usagers et usagères, à commencer par les jeunes lycéens et lycéennes, dans des assemblées générales d’établissement, pour définir l’école que nous voulons et parvenir à une transformation radicale et autogestionnaire du système éducatif. L’école appartient à tous et toutes, nous devons tous contribuer à sa transformation pour en faire le lieu d’une véritable émancipation.
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