"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
mercredi 8 février 2012
Traité européen : la duplicité du PS - par Raoul Marc Jennar
François Hollande, candidat du PS à l’élection présidentielle, proclame haut et fort qu’il s’adressera aux partenaires de la France signataires du « traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire » adopté lors du Conseil Européen du 30 janvier afin de renégocier ce traité pour le compléter par des mesures en faveur de la croissance. Peut-on le croire ? Peut-on lui faire confiance ? Assurément non. Parce qu’il a soutenu Jospin qui avait promis aux électeurs de renégocier le traité d’Amsterdam en 1997 et qu’une fois Premier ministre, Jospin avec l’appui de Hollande s’est empressé de le faire ratifier. Parce qu’il avait promis aux électeurs de 2007 qu’il n’y aurait plus de nouveau traité européen sans référendum et qu’en 2008, sous son autorité, le PS a apporté ses voix à l’UMP pour faire en sorte que le traité de Lisbonne puisse être ratifié sans que le peuple soit consulté.
Et parce qu’aujourd’hui, dans le même temps où il s’engage à renégocier ce nouveau traité, au Parlement européen, le groupe socialiste vient de rédiger une résolution commune avec la droite (le Parti populaire européen de Merkel et Sarkozy), les libéraux (dont le Modem de Bayrou) et les Verts de Cohn Bendit. Elle a été déposée sous la référence B7 0044/2012. Que dit cette résolution adoptée ce 2 février (référencée P7_TA-PROV(2012)0023) ?
Même si le texte comporte des regrets et des souhaits, pour l’essentiel, la résolution indique que les quatre groupes parlementaires précités – et donc la majorité du Parlement – prennent acte de ce traité. Et qu’ils estiment « que, pour plusieurs points, le texte final représente une amélioration par rapport au texte initial et qu’un certain nombre des modifications proposées par le Parlement ont été reprises dans celui-ci. » En clair, cela signifie que ces quatre groupes politiques, avec quelques restrictions sans doute, acceptent ce traité.
Si plusieurs députés PS français se sont abstenus (Peillon avait voté contre, mais il a fait corriger son vote en abstention), ils appartiennent à un groupe politique qui a assuré le succès de cette résolution. En présence d’une question aussi importante, quelle est la crédibilité d’un candidat qui dit une chose à Paris, mais dont les représentants au niveau européen disent le contraire ou s’abstiennent ?
La Gauche Unitaire Européenne (GUE) avait déposé une proposition de résolution, notamment sous la signature de Jean-Luc Mélenchon, qui n’a pas été soumise au vote vu l’adoption de la résolution majoritaire. En voici le texte :
A. considérant que les mesures adoptées par les chefs d’État et le Conseil de l’Union n’apportent pas de solution aux principaux facteurs ayant déclenché la crise, à savoir la dépendance excessive vis-à-vis des marchés financiers et les disparités macroéconomiques de plus en plus importantes au sein de la zone euro;
B. considérant que malgré ses effets dévastateurs, la dépendance vis-à-vis des marchés financiers n’a fait qu’augmenter depuis le début de la crise financière et que seuls le contrôle public des banques et l’octroi de prêts à taux réduit aux États membres par la Banque centrale européenne peut y mettre fin;
C. considérant que le traité proposé enlèvera aux gouvernements démocratiquement élus des États membres toute possibilité de choix en matière budgétaire, qu’il privera les peuples d’Europe ainsi que les parlements nationaux de tout contrôle démocratique et qu’il mettra en place un mécanisme d’austérité permanente;
D. considérant que la crise de confiance entre les populations des États membres de l’Union et les institutions de l’Union ne fait que s’étendre et qu’elle entraîne une crise de légitimité à l’égard de l’Union;
E. considérant que le processus ayant abouti à cet accord n’a pas été transparent et qu’il n’a donc pas fait l’objet du contrôle démocratique qui devrait caractériser toute réforme de l’Union;
F. considérant que dans toute l’Europe, les gouvernements ont accepté les diktats des marchés financiers en axant intégralement leurs politiques sur la satisfaction des marchés;
G. considérant qu’aucun changement politique de taille ne peut être engagé au sein de l’Union sans y associer pleinement le Parlement européen et les parlements nationaux;
H. considérant que la population perçoit de plus en plus les politiques de l’Union comme une menace pour son bien-être économique et social, comme une source d’insécurité croissante pour son emploi et ses revenus, comme une instance qui encourage l’inégalité et l’injustice ainsi que comme un obstacle au contrôle démocratique, par la population, de sa propre existence;
1. est d’avis que les mesures adoptées par le Conseil européen ne feront qu’aggraver la crise du capitalisme mondial;
2. rappelle que la crise actuelle de la dette souveraine est due à des facteurs extrêmement complexes et qu’on ne la résoudra pas par la réduction unilatérale des dépenses, comme le préconise le traité;
3. rejette le traité international sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire ainsi que les modifications récentes apportées à l’architecture de l’UEM (gouvernance économique, semestre européen, pacte pour l’euro plus); estime que ces changements constituent la réponse néolibérale la plus réactionnaire, la plus antidémocratique et la plus extrême à la crise actuelle;
4. rappelle que les causes profondes de la crise tiennent notamment à la déréglementation de secteurs industriels essentiels, au déséquilibre des balances des paiements courants et aux taux d’inflation divergents qui en découlent en raison des disparités de la dynamique du coût salarial unitaire ainsi qu’à l’incapacité de nombreux États membres de taxer effectivement la fortune et les grandes entreprises;
5. estime en outre que le projet de traité international institutionnalisera l’austérité et abandonnera le principe d’égalité démocratique des droits entre les 27 États membres, ce qui aggravera inévitablement la crise, menacera la niveau de vie de la majorité de la population de l’Union et augmentera les inégalités entre États membres tout en créant des clivages qui déboucheront sur une Union à plusieurs vitesses et, ce faisant, mettront en danger l’existence de l’euro, voire de l’Union toute entière;
6. rappelle que certains États membres profitent de la crise de la dette souveraine; rappelle que l’exportation soutenue par certains États membres a nettement contribué à déplacer les ressources productives de leur destination et à créer des bulles économiques et demande à ces pays de contribuer davantage à apporter une solution à la crise; demande aux États membres de mettre en place des mécanismes fondés sur la solidarité et la proportionnalité;
7. dénonce le fait que le projet de traité international sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire s’attache aux mêmes instruments que ceux qui ont provoqué la crise au lieu de réorienter le développement économique de l’Union vers le plein emploi (par des emplois plus nombreux et de qualité), la croissance socioéconomique, la cohésion sociale (et notamment la lutte contre la pauvreté, les inégalités de revenu et le chômage) ainsi que la protection de l’environnement;
8. s’oppose à l’introduction d’une nouvelle règle fixant le déficit structurel annuel des États membres à 0,5 % du PIB nominal, car elle se traduira par une austérité permanente et la poursuite du déclin économique, lesquelles alimenteront le cercle vicieux de la baisse des recettes publiques et de l’augmentation de la dette, et s’oppose vivement aux sanctions et aux conditions d’obtention d’une aide supplémentaire;
9. estime par ailleurs que la mise en place d’un mécanisme de réduction de la dette d’un vingtième par an afin de parvenir à une dette équivalent à 60 % du PIB est non seulement irréalisable, mais qu’elle anéantira les efforts des gouvernements pour faire redémarrer leurs économies et sortir de la crise;
10. demande aux États membres de mettre fin au déplacement actuel des richesses des salaires vers les dividendes car cette situation débouchera inévitablement sur la poursuite de la déstabilisation économique et la création de bulles financières;
11. réaffirme que pour résoudre la crise, il faut des mesures globales et durables telles que la conclusion d’accords de restructuration de la dette des économies surendettées comportant notamment des dépréciations de dette ainsi que des investissements permettant de stimuler la croissance dans l’économie verte grâce à la capacité de prêt de la Banque européenne d’investissement;
12. se dit fermement convaincu que le retour à l’équilibre des comptes publics passe par une politique à long terme comprenant l’imposition de la fortune, une taxe sur les transactions financières, la lutte contre la fraude fiscale et l’évasion fiscale, l’intervention appropriée de la BCE ainsi qu’un contrôle strict du secteur financier;
13. estime que des engagements de l’ampleur de ceux que prévoit le projet de traité international passent obligatoirement par la consultation la plus large possible des populations par voie de référendums organisés selon les règles nationales; souligne que ces référendums doivent être organisés sans ingérence politique de la Commission européenne; est par ailleurs d’avis que les gouvernements des États membres où un référendum n’est pas possible doivent donner à leur population la possibilité de se prononcer sur la ratification de ce projet de traité par consultation populaire;
14. fait observer que toute modification de la constitution irlandaise passe par un référendum et qu’en vertu de celle-ci, les compétences budgétaires appartiennent au parlement et au gouvernement irlandais, ce qui oblige à modifier la constitution en cas de transfert de compétences budgétaires (…).
Chacun appréciera.
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