mardi 12 février 2013

1500 manifestant-e-s à Nantes, 500 à Saint Nazaire : la mobilisation sociale s'enracine !, suivi du discours de Didier Hude (FSU 44)


A l'appel de l'intersyndicale FSU, CGT, FO, SUD, 1500 enseignants et personnels de l'éducation se sont retrouvés devant la Préfecture de Nantes. Leur objectif : imposer le report de la réforme gouvernementale sur les rythmes scolaires (semaine de 4 jour et demi pour les enfants). 

Au même moment, 500 syndicalistes CGT se retrouvaient Place de l'Amérique Latine à Saint Nazaire pour dénoncer la politique gouvernementale d'austérité et de flexibilité et pour défendre l'emploi et les salaires. 

 Ces deux manifestations traduisent incontestablement un premier enracinement de la résistance sociale à la politique gouvernementale. Avec pour tous les manifestant-e-s, une certitude : avec Hollande-Ayrault, nous n'aurons que ce que nous imposerons !

Discours de Didier Hude, secrétaire de la FSU 44
Refonder la façon de penser la chose politique car la modernité technocratique, de thinck tanks en banch mark, n’est rien d’autre qu’une entreprise à embrigader par le dogme, à imposer l’austérité voulue des uns pour le profit des autres. L’Ecole en crève, comme le reste.





Refonder l’Ecole ! Vaste Programme ! Il suppose, au-delà des mots, de se donner le temps d’une concertation qui ne fait pas semblant. En particulier avec les partenaires sociaux de l’éducation, de toute l’éducation, même périscolaire. Sinon, comme du temps de la droite décomplexée de Sarkozy, on ne concerte que pour amuser la galerie… des fantômes. Les réformes Chatel, Darcos et Fillon ont relégué la concertation au placard. Quand on les ouvre, on y trouve les cadavres des RASED, les tontons flingueurs des livrets de compétences, les armes contendantes de « base élèves », 80 000 emplois détruits et j’en oublie. Sur le fond, la concertation Peillon, c’est plus mignon : 60 000 emplois rétablis, un socle commun moins rabougri, des aides personnalisées rafraîchies. Mais de vrai dialogue que nenni. Hormis avec les « copains » du dialogue social d’accompagnement, ceux des clones syndicaux d’écuries politiques. Les autres ne sont que fantômes évanescents d’une galerie de silhouettes, vagues formes d’un dialogue social virtuel sur une toile, toile antique comme celle d’une araignée.

Dialoguer à quoi bon ? Les élus ont les pleins pouvoirs du temps de leur mandat. Je gouverne pour vous. Je pense pour vous. Et pour le reste ma Loi – qui n’a rien d’un fantôme – vous le dit : dans le cadre de nos engagements européens… le niveau global des élèves… doit inscrire le pays dans une croissance structurelle forte… dans une économie de la connaissance internationale… L’école doit entrer dans la modernité… Ouh ouh ouh. À quoi bon concerter quand on cause si bien technocrate libéral dans l’esprit comme dans le texte ? Pour les bâtisseurs d’empire légitimés par le suffrage universel, les fantômes suffisent au dialogue. L’essentiel c’est de décider dans l’entre soi autorisé des ajustements structurels.

Alors refonder oui ! Refonder l’Ecole aussi ! Mais refonder la façon de gouverner ! Refonder la façon de penser la chose politique car la modernité technocratique, de thinck tanks en banch mark, n’est rien d’autre qu’une entreprise à embrigader par le dogme, à imposer l’austérité voulue des uns pour le profit des autres. L’Ecole en crève, comme le reste.

Mais, dames et sieurs fantômes de basse cour, limitons notre propos aux rythmes scolaires ! Votre enfant va trop longtemps à l’Ecole dans la semaine, pas assez dans l’année ? Réformons ! Votre enfant ira autant de temps à l’Ecole, même plus par semaine, mais ce sera pas pareil puisque ce sera différent. Les maires vont s’occuper de tout et payer à court terme la facture d’un temps qui, autrefois scolaire et obligatoire, sera devenu d’un tour de main facultatif, de garderie plus ou moins améliorée. Ce temps sera payant ici, là ou ailleurs. Payant ? Eh oui payant. Au diable l’égalité territoriale ! Quand on aime ses élus locaux, on ne compte pour l’école des marmots. Rutilante à Nantes ou fanée à Guémené, l’essentiel c’est de participer.

L’élu local est brave, dévoué, les Français aiment leurs maires. C’est bien connu. Leur donner du pouvoir en organisant du beau périscolaire, avec les copains des associations, tous les bénévoles du cru et les volontaires là, autour, pleins de savoir-faire, c’est-y pas une idée qu’elle est bonne ? Le projet éducatif local, validé par l’inspecteur de l’éducation, qui restera ainsi nationale, sera la preuve incontournable de la cohérence éducative. Qui peut croire ça bien longtemps quand on voit ce que sont devenus les contrats éducatifs locaux là où ils on pu exister ? Et comment va-t-on faire fonctionner des conseils d’école chronophages, des projets d’école liés aux moyens octroyés ici et là et les concertations pédagogiques avec tous les acteurs ? 

Quant aux locaux ? Quels locaux ? On prendra les classes et tant pis pour les conflits d’usages entre activités. Les transports scolaires ? Quels transports scolaires !

Ce projet oublie aussi les personnels de service des écoles, et les personnels de service du périscolaire. Il ignore les personnels de l’animation périscolaire, les personnels de l’extrascolaire qui ne sont pas forcément les mêmes. Il organise un allègement législatif des taux d’encadrement à l’école sur temps périscolaire. Au lieu de construire, le décret sur les rythmes ne fait que dynamiter dans la précipitation. Il dynamite des espaces de travail, sans se préoccuper des emplois existants, des missions scolaires et périscolaires supposant la coéducation avec les parents. On n’en parle pas assez mais la professionnalisation et la nécessaire reconnaissance des franchises éducatives pour garantir la laïcité est un enjeu majeur pour le scolaire, comme pour le périscolaire exposé tout autant sinon plus, aux appétits marchands, comme aux prosélytismes éducatifs. Le débat est lourd, il est complexe, il suppose de qualifications et professionnalisation. Le projet Peillon actuel sur les rythmes peut même devenir pernicieux quant au fait de reléguer au périscolaire les activités artistiques ou physiques alors que ces dernières sont des supports pédagogiques majeurs pour des apprentissages.

Quand la FSU demande de prendre du temps, ce n’est pas pour enliser les choses. C’est pour les bien traiter, dans l’intérêt voulu et recherché des enfants qui rejoint forcément en matière éducative l’élaboration avec l’ensemble des acteurs de l’éducation. Si les décideurs des politiques publiques peuvent un jour comprendre que leur grandeur viendra tout autant de leur intelligence à savoir concerter que de leur légitimité temporaire donnée par les urnes, on aura certainement fait un pas pour renouer avec des valeurs dites de gauche.

En attendant quel gâchis. La méthode utilisée ignore des pans entiers d’acteurs et le projet ne réussit qu’à cabrer. Quand l’insulte arrive ensuite à taxer piteusement de corporatismes et de fonctionnaires nantis, les voix en opposants des différentes professions, on confine à l’erreur politique grave.

Camarade Peillon, les fantômes de la rue te saluent. La gouvernance des coups de menton et des coutures de pantalon, c’est pas celle de l’éducation.

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