lundi 18 novembre 2013

Le sauvetage du Crédit lyonnais n’est pas « une solution conforme à l’intérêt des finances publiques », par le CADTM


Au début des années 1990, éclatait « l’affaire du Crédit lyonnais », un des plus gros scandale bancaire français. Un rapport parlementaire dénonce le système des avances et prêts à risques, notamment dans le domaine immobilier où, avant l’effondrement du secteur, le portefeuille de la banque s’élevait à 100 milliards de francs (soit 15,24 milliards d’euros) |1|. S’ensuit une série de scandales, notamment le rachat de la société de production et de distribution Metro Goldwyn Mayer (MGM) à 5,5 milliards de francs (0,84 milliard d’euros) un an avant sa faillite ; ou encore les filiales mal gérées comme Altus finance, dont les pertes sont estimées dans un rapport très critique de la Cour des comptes sur la gestion des années 1990 à 1993, à environ 20 milliards de francs (3,05 milliards d’euros) ; ou encore l’affaire appelée Tapie, Lagarde ou Adidas au fur et à mesure des cyniques rebondissements et des mises en examen. 


En 1993, le Crédit lyonnais, alors propriété de l’État, est en situation de quasi-faillite. Pour venir en aide à la banque, deux structures sont mises sur pied : en 1995, le Consortium de réalisation (CDR) et en 1997 l’Établissement public de financement et de restructuration (EPFR). Le CDR avait été initialement créé comme structure de défaisance du Crédit lyonnais, dont il était la filiale. Mais en 1995, la Commission européenne impose à la France de séparer le CDR de la banque. L’État français crée alors l’EPFR qui exerce la tutelle du CDR et assure son financement en souscrivant auprès du Crédit lyonnais un prêt de 130 milliards de francs (environ 19,82 milliards d’euros). Ce prêt est censé être remboursé grâce aux cessions d’actifs opérées par le CDR. Mais le montant des produits ne suffit pas à couvrir les financements. Le déficit doit donc être comblé par l’actionnaire de l’EPFR : l’État qui doit régler 4,5 milliards d’euros avant le 31 décembre 2014. 

Un article de la Loi de finances rectificative de 2013 qui doit être présenté mercredi 13 novembre en Conseil des ministres "autorisera l’Agence France Trésor – le service de Bercy chargé de la dette – à emprunter 4,5 milliards d’euros sur les marchés financiers", avec pour objectif de rembourser "les dernières dettes générées par la quasi-faillite de cette banque publique en 1993". L’anticipation de l’échéance est justifiée selon la classe politique par « des conditions de crédit, de financement exceptionnelles » et constitue « une solution conforme à l’intérêt des finances publiques ». 

Alors que Pierre Moscovici, ministre de l’économie déclare penser avant tout aux contribuables, le CADTM dénonce un nouveau tour de passe-passe qui n’est ni conforme à l’intérêt des finances publiques, ni à celui des contribuables. Rappelons que les sauvetages bancaires constituent une socialisation de dettes privées. Ces sauvetages et l’endettement public qui en résulte n’ont pas servi l’intérêt de la population et sont largement illégitimes. 

L’affaire du Crédit lyonnais montre de nouveau l’importance et l’urgence de mener un audit citoyen de la dette publique pour décider collectivement et démocratiquement des solutions conformes à l’intérêt général et à la justice sociale. 

Notes |1| Conversion cours initial : 1 euro = 6,55957 francs

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