La panne de l’ascenseur social, la montée du chômage de masse, la précarisation croissante des jeunes, les attaques contre les services publics de proximité, l’accentuation de la ségrégation urbaine, conséquences de la domination du capitalisme néo-libéral, ont des effets particulièrement « dévastateurs de vie » dans les quartiers populaires.
Mais la question sociale ne peut résumer à elle seule la situation de ces quartiers.
Les immigrations des dernières décennies proviennent en grande partie des anciennes colonies d’Afrique noire ou du Maghreb et des actuels DOM, départements d‘outre-mer dont la récente lutte du LKP a mis en évidence le caractère colonial. Cependant, il convient de ne pas oublier que l’immigration connait une très forte mondialisation qui s’est accélérée depuis une dizaine d’années et qu’elle dépasse aujourd’hui largement les limites de l’ex-empire colonial : immigration turque, balkanique, caucasienne, roms, indienne, chinoise et venant de l’Europe centrale et orientale. Noires, arabes, asiatiques, souvent musulmanes ( probablement autour de 4 millions aujourd’hui ) ces personnes, immigrées ou non, souvent de nationalité française, parfois non, vivent majoritairement dans ces quartiers et sont rejetées, stigmatisées, discriminées.
Ces dernières années, l’injonction de l’assimilation comme son pendant – le discours de l’exclusion - ont pris des proportions inquiétantes, souvent relayés par des milieux qui n’étaient pas classés à droite.
Les gouvernements, y compris ceux se réclamant de la gauche, ont réactualisé les images et les expressions qui peuplaient l’imaginaire colonial pour opposer la figure acceptable de « l’immigré intégré » et celle du « sauvageon » ou de la « racaille » délinquante.
Nicolas Sarkozy a construit une partie de sa popularité sur l’intransigeance contre cette « racaille des cités ». Il a bâti une partie de sa campagne électorale de 2007 sur la réhabilitation du grand œuvre colonial : il faut être fier d’être français et naturellement méfiant vis à vis de ceux-celles qui ne le sont pas ou qui menacent « nos valeurs ». Au gouvernement, il a accentué la chasse aux immigrés ; il a stigmatisé à nouveau les habitant-e-s des cités et il a exalté la suprématie occidentale (discours de Toulon puis de Dakar). Il est d’ailleurs difficile de comprendre le sens de la campagne sur l’identité nationale si on ne la situe pas dans le prolongement du nouveau discours dit décomplexé de la droite française depuis quelques années. Il s’agit d’une reconquête idéologique et pratique qui va au-delà du calcul électoral.
Cette situation a nécessairement des conséquences sur la façon dont les populations des cités, notamment les jeunes issus de la colonisation, français pour la plupart, perçoivent leur existence sociale et leur insertion dans la société française. Les sifflets au stade de France lors du match France-Algérie doivent être analysés à la lumière de ce contexte.
La négation des appartenances culturelles, religieuses et d’origine, sous couvert d’universalisme abstrait fabrique du ressentiment, une sur-valorisation des identités particulières et détourne des mécanismes fondamentaux de l’oppression sociale.
Véhiculant l’idée de l’incompatibilité des cultures et alimentant ainsi l’idéologie du choc des civilisations, sous couvert de lutte contre le terrorisme, les impérialismes dominants donnent un coup de fouet à la xénophobie d’Etat et à l’islamophobie ( ou racisme anti-musulman ), cette dernière relayant, sans le faire disparaître, le vieux fonds du racisme anti-arabe. Les nouvelles classes dangereuses, cibles privilégiées des nouveaux dispositifs de sécurité et des violences policières, sont souvent musulmanes et non-blanches.
Le caractère systémique des discriminations a été établi par les recherches en sciences sociales. A l’embauche, dans l’emploi, au logement, dans les loisirs, la consonance du nom et/ou la couleur de la peau sont un véritable mur qui crée une souffrance sociale souvent ignorée et redoublée par la négation de l’existence de ce mur.
Les politiques gouvernementales, de gauche comme de droite, n’ont pas engagé de véritable plan de lutte contre ces discriminations. Au contraire, elles ont contribué à stigmatiser les banlieues populaires et à reléguer leurs habitants au rang de citoyen-nes de seconde zone qui doivent faire la preuve, constamment renouvelée, de leur intégration aux « valeurs de la république ». Les « politiques de la ville » mises en œuvre, privées de moyens, relèvent de cette conception à laquelle a été adjoint le volet sécuritaire ( les fameux « contrats locaux de sécurité ») et répressif.
Les Alternatifs sont un mouvement politique. Ils considèrent la question du racisme et des discriminations comme un problème politique, c’est à dire comme le produit de la domination d’un certain type de rapport social, de la même manière que la domination des hommes sur les femmes et celle du capital sur le travail.
La prise en compte réelle de ces questions et l’élaboration de solutions politiques par l’ensemble de la gauche de transformation sociale et écologique est une condition de son développement. Le nouveau prolétariat des quartiers populaires est le plus souvent victime d’une double oppression, sociale et raciste, et, pour une personne sur deux d’une triple oppression. Le développement de ses propres formes d’organisation est une condition de son émancipation. Mais il faut aussi qu’il « utilise » les mouvements politiques de contestation comme le nôtre et, pour cela, que ces mouvements fassent la preuve de leur capacité à intégrer ses préoccupations.
L’UE 2010 des Alternatifs s’inscrit dans cette perspective. Nous souhaitons qu’elle constitue un moment fort pour s’emparer de ces questions. Nous pensons que l’échange et le débat sur ces thèmes, trop longtemps laissés en friche par la gauche de transformation sociale, a acquis un caractère d’urgence. Nous entendons bien faire de cette université un lieu de rencontre entre tous ceux et celles, mouvements politico-associatifs, organisations politiques, associations de jeunes, intellectuels engagé-e-s …. qui chacun à leur manière luttent sur le terrain pour la justice sociale, contre les exclusions et les discriminations et pour l’égalité des droits.
Le bulletin de participation comportant vos noms, adresse et références ainsi que le chèque libellé à l’A.F.Alternatifs sont à envoyer aux Alternatifs, 40 rue de Malte, 75011 PARIS
Afin de faciliter le travail de l’équipe d’organisation, des inscriptions rapides sont nécessaires. Les tarifs proposés correspondent à un hébergement pour 3 nuits, 3 petits déjeuners, 6 repas. Les chèques sont libellés à l’ordre d’A.F. ALTERNATIFS
◦Tarif 1 du 9 au 12 juillet AUBERGE MUNICIPALE 170 euros
◦Tarif 2 du 9 au 12 juillet AUBERGE MUNICIPALE 60 euros (réservé aux personnes à faibles revenus, précaires, jeunes en formation)
◦Tarif 3 du 9 au 12 juillet HOTEL 270 euros
Bulletin d’inscription à envoyer à ALTERNATIFS/UNIVERSITE D’ETE 40, rue de Malte 75011 Paris. Un départ collectif de Nantes est organisé (contact 44@alternatifs.org)
Le Programme
VENDREDI 9 JUILLET 13 h 30 – 15 h 30 : Accueil 16 h – 18 h : PLENIERE INTRODUCTIVE : « Les quartiers populaires : état des lieux et mise en perspective politique » 18h30 : Pôt d’accueil de la Mairie de Saint-Denis
SAMEDI 10 JUILLET
MATIN : 9H - 11h PLENIERE : Racisme : quelles formes dominantes aujourd’hui en France ? Ateliers de 11h15 à 12h45 APRES-MIDI 14h30 - 16h30 PLENIERE : L’héritage colonial : quels enjeux et quelles luttes ? Ateliers de 17h00 à 19h00 Soirée avec la compagnie Jolie Môme
DIMANCHE 11 JUILLET MATIN 9h00 - 11h00 PLENIERE : Les discrimination : oppression de classe, oppression de genre, oppression de d’origine Ateliers de 11h15 à 12h45 APRES-MIDI Ateliers de 14h30 à 16h30
17 h 00 Le DEBAT CENTRAL : Luttes dans les cités et émancipation. Comment articuler les luttes spécifiques et la perspective d’émancipation générale ? Autonomie des luttes ou unité populaire ? Comment constituer un bloc social et politique ? Intervenant-e-s : organisations politiques invitées
LUNDI 12 JUILLET MATIN 9h00- 11h00 PLENIERE : La « guerre des cités » : politiques sécuritaires, violences policières et « classes dangereuses »
ateliers
Liste des ateliers proposés à ce jour : liste non-exhaustive et non définitive. Les titres ne sont pas définitifs non plus.
1.Colonisation et immigration dans les programmes scolaires. Animation : commission Éducation des Alternatifs
2.Zone d’Enseignement Prioritaire Animation : commission Éducation des Alternatifs
3.Y a-t-il une oppression spécifique des femmes dans les quartiers populaires ? Animation : commission féminisme des Alternatifs
4.Quelle est la place des femmes d’origine immigrée, post-coloniale ou non, dans la société ? Animation : commission féminisme des Alternatifs
5.DOM, TOM, COM : les confetti de l’empire
6.Transformer les rapports de domination Nord-Sud
7.Droit de vote des résident-e-s étrangers.
8.Nouvelles formes de lutte des sans-papiers Animation : Fédération Les Alternatifs Seine St Denis
9.Politiques de la ville, politiques de dupes ?
10.La question palestinienne et les jeunes des cités
11.La condition noire en France
12.Identité, identités ?
13.La figure de l’immigré et du colonisé dans les médias
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