"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
vendredi 22 juillet 2016
Attentat de Nice : À ceux qui vantent le « modèle » israélien, par Denis Sieffert (édito de Politis)
Avec inconscience ou avec d’inavouables arrière-pensées, on ne sait pas. Toujours est-il que nombreux sont les médias qui, depuis le massacre de Nice, donnent en exemple de résilience au terrorisme le « modèle » israélien.
Tous ne le font pas de la même façon. Rendons justice au correspondant du Monde qui prend soin de rappeler le contexte colonial du conflit israélo-palestinien. Mais, la plupart s’en tiennent à une approche apparemment « technique ». Les Echos, le JDD, France 2, France Inter (avec l’ex-porte parole de l’armée israélienne), entre autres, suggèrent que la France devrait s’inspirer d’Israël.
On voit bien là toute l’ambiguïté du concept de terrorisme. Que ce soit Daech, un psychotique alcoolique et délinquant, ou un Palestinien dont on vient de détruire la maison et les terres cultivables pour cause d’extension coloniale, c’est du pareil au même.
On retrouve là le discours colonial que l’on a bien connu pendant la guerre d’Algérie quand les militants du FLN étaient tous des « terroristes ». Inconsciemment ou non, les promoteurs du modèle israélien amalgament une révolte violente contre une injustice, et des actes de terreur sans cause immédiate.
La révolte contre un État en infraction constante avec le droit international peut bien sûr être condamnée quand elle est aveugle et vise des innocents, mais la condamnation ne peut pas se faire sans en rappeler le contexte politique et historique : la colonisation massive à laquelle se livre le gouvernement israélien.
En Israël, l’antiterrorisme le plus efficace consisterait à cesser la colonisation et à entamer une négociation pour la reconnaissance d’un État palestinien souverain. Ce à quoi se refuse totalement Benyamin Netanyahou. On ne peut pas s’émouvoir des conséquences quand on est soi-même la cause.
Le discours pseudo-technique est également effrayant. On peut vanter l’efficacité des barrières métalliques devant les abris bus dans les rues de Jérusalem, mais il est plus difficile de faire l’éloge du « mur », comme certains le font.
Si cet édifice géant, qui atteint parfois huit mètres de haut, est un obstacle à l’entrée de Palestiniens en Israël, il est aussi et d’abord un instrument de colonisation qui empiète massivement sur le territoire palestinien, isole les villages des terres cultivables, et sert de prétexte à la destruction d’habitations.
Autrement dit, ce mur, présenté dans quelques uns de nos médias comme un instrument de la lutte anti-terroriste, est surtout une cause de révolte. Le « mur » symbolise à lui seul toute l’ambiguïté du modèle israélien d’anti-terrorisme.
Mais il y a pire. Les laudateurs du système israélien vantent, involontairement ou non, deux « techniques » : les arrestations préventives et…les assassinats ciblés. Plus de sept cents Palestiniens sont aujourd’hui détenus administratifs sans jugement. Quant aux assassinats ciblés de simples suspects, ils sont toujours une pratique courante de l’armée israélienne. En 2006, la Cour suprême d’Israël en a autorisé la pratique « sous certaines conditions ».
Le plus grave se cache sous une formulation innocente : la « sensibilisation du grand public ». On touche là à quelque chose de beaucoup plus complexe qui a un rapport étroit avec la propagande et le conditionnement de la population. Et, pourquoi ne pas le dire, avec un racisme massif, qui fait de tout Arabe un suspect sur lequel, au moindre geste inquiétant, on aura droit de vie ou de mort.
Ce n’est pas par hasard si Israël a aujourd’hui le gouvernement le plus à droite de son histoire. Et si son ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, est connu pour des propos tels que « ceux qui sont contre nous méritent d’être décapités à la hache ». « Contre nous », faut-il le préciser, cela veut dire contre la colonisation.
En France, les responsables politiques ou les médias qui prétendent vouloir faire barrage au Front national font ainsi discrètement l’apologie d’un gouvernement qui n’a vraiment rien à envier au Front national. Un gouvernement qui veut évincer du Parlement les députés arabes et qui organise la traque des organisations des droits de l’homme.
Il n’y a pas de mesures anti-terroristes qui ne mettent en cause toute la conception d’une société. Enfin, la référence à Israël est un véritable chiffon rouge quand on sait que la question palestinienne reste la cause principale d’amertume et de frustration du monde arabe. Ceux qui se livrent à ce jeu dangereux peuvent-ils l’ignorer ?
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