jeudi 12 septembre 2013

"El pueblo unido, jamas sera vencido !" - Hommage à Salvador Allende et solidarité avec le peuple chilien à Nantes


Une centaine de personnes se sont retrouvées hier soir 11 septembre square Daviais à Nantes pour commémorer le quarantième anniversaire du coup d'état fasciste au Chili. Parmi eux nombre de celles et ceux qui ont partagé  l'activité des comités de solidarité avec l'Amérique Latine et des responsables et militant-e-s des principaux partis de gauche (PS, PCF, Parti de Gauche, Gauche Anticapitaliste, Alternatifs, NPA).

Reprenant la formule de Camila Vellejo, ex-présidente de la fédération des étudiants des universités du Chili (FECH) dans Le Monde Diplomatique "évoquer le nom de Salvador Allende, ce n'est pas seulement parler du passé. C'est penser le présent et préparer l'avenir", Ariel Aliaga et Rosa Maraboli ont, tour à tour, expliqué comment, quarante ans après le coup d'état de Pinochet, les ravages politiques et sociaux de la dictature étaient toujours présents, avec toujours en place la même Constitution et un ultra-libéralisme qui précarise les travailleurs, atomise le peuple et accroît les inégalités. Et, tandis qu'un drapeau mapuche rejoignait le drapeau chilien, Rosa a aussi largement développé sur le sort des populations indiennes mapuches du Chili et sur la répression brutale dont ils sont victimes. 


Après la lecture d'un message d'un ex-réfugié chilien de Nantes retourné au Chili : « ce soir on ira comme chaque année au stade national pour mettre des bougies pour tous les companeros et companeras... On est vivant avec nos joies, nos peines, mais surtout on a la joie d'avoir connu des gens comme vous dans une époque si importante de nos vies. On a connu l'amitié et la solidarité loin du Chili et nos traces et vos traces sont toujours très vivantes », c'est par la voix de Salvador Allende* que s'est conclu la première partie de ce rassemblement avant que artistes chiliens et argentins ne la poursuivent en musique et chansons. 

Extrait du discours prononcé par Salvador Allende devant l'ONU le 4 décembre 1972 

"... Mais le Chili est aussi un pays dont l'économie arriérée a été soumise et aliénée à des entreprises capitalistes étrangères, un pays qui a été conduit vers une dette extérieure supérieure à 4 millions de dollars, dont le remboursement annuel revient à plus du 30% de la valeur de ses exportations; un pays dont l'économie est extrêmement sensible face à la conjoncture extérieure, chroniquement ésoufflée et inflationnaire, où des millions de personnes ont été obligées de vivre dans des conditions d'exploitation et de misère, de subir des licenciements ouverts ou déguisés. 

Je viens ici, aujourd'hui, parce que mon pays rencontre des problèmes qui, par leur dimension universelle, sont l'objet de l'attention permanente de cette assemblée: la lutte pour la libération sociale, l'effort pour le bien-être et le progrès intellectuel, la défense des individus et de la dignité des nations. Jusqu'il y a peu, la perspective de ma patrie, comme celle de nombre d'autres pays du Tiers Monde, était le modèle d'une modernisation-éclair, modèle dont certaines études techniques aussi bien que la réalité tragique des faits démontrent qu'il est condamné à exclure l'idée même de progrès,  [...] en offrant à des millieurs de personnes des conditions de vie inhumaines. Modèle qui conduit à la restriction des biens de première nécessité, qui condamnera un nombre toujours plus grand de citoyens au chomage, à l'analphabétisme, à l'ignorance et à la misère physiologique. La même perspective, en somme, qui nous a maintenus dans une relation de colonisation et de dépendance, qui nous a exploités aux temps de la guerre froide, mais également à l'époque des guerres bien réelles comme dans les périodes de paix. 

Nous autres, les pays sous-développés, sommes condamnés par certains à n'être que des réalités de seconde classes éternellement subordonnées. Ce modèle, c'est celui que les travailleurs chiliens, en devenant les protagonistes de leur propre avenir, ont décidé de refuser, cherchant au contraire à se développer rapidement, de manière autonome et originale, en transformant de façon révolutionnaire les structures traditionnelles.  [...] 

Depuis le moment où nous avons trionfés aux élections du 4 septembre 1970, nous sommes affectés par des pressions extérieures de grande envergure, qui prétendent empêcher l'installation d'un gouvernement librement choisi par le peuple, et l'abattre. Qui a voulu nous isoler du monde, étrangler l'économie et paralyser le commerce de notre principal produit d'exportation: le cuivre. Et nous priver de l'accès au financement international.  [...] 

Nous sommes face à des forces qui opèrent dans l'ombre, sans drapeau, avec des armes puissantes, postées dans des zones d'influence directe.  [...] Nous sommes face à un conflit frontal entre les multinationales et les États. Ceux-ci sont court-circuités dans leurs décisions fondamentales - politiques, économiques et militaires - par des organisations qui ne dépendent d'aucun État, et qui à l'issue de leurs activités ne répondent de leurs actes et de leurs fiscalités devant aucun parlement, aucune institution représentative de l'intérêt collectif. En un mot, c'est toute la structure politique du monde qu'on est en train de saper.  [...] 

Notre problème n'est pas isolé et unique. C'est la manifestation locale d'une réalité qui nous dépasse, qui englobe tout le continent latino-américain et le Tiers Monde. Tous les pays périphériques sont soumis à quelque chose de semblable, avec une intensité variable, avec certaines spécificités. Le sens de la solidarité humaine qui régit les pays développés doit regarder avec répugnance le fait qu'un groupe d'entreprises puisse intervenir impunément dans les rouages les plus importants de la vie d'une nation, jusqu'à la perturber totalement.  [...] 

Je sais maintenant, d'une certitude absolue, que la conscience des peuples latino-américains quant aux dangers qui nous menacent tous, a acquis une nouvelle dimension, et que l'unité est la seule manière de se défendre contre ce grave péril. 

Quand on sent la ferveur de centaine de milliers d'hommes et de femmes, se pressant dans les rues et sur les places pour dire avec détermination et espoir: "nous sommes avec vous! Ne cédez pas! Vous allez gagner!", tous les doutes se dissipent, toutes les angoisses s'effacent. Ce sont les peuples, tous les peuples au sud du Río Bravo, qui se dressent pour dire: BASTA! BASTA à la dépendence! BASTA aux pressions! BASTA à l'interventionnisme! Pour affirmer le droit souverain de tous les pays en développement à disposer librement de leurs ressources naturelles. C'est une réalité, la volonté et la conscience de plus de 250 millions d'individus qui exigent d'être entendus et respectés. 

Des centaines de milliers de Chiliens m'ont salué avec ferveur au moment où j'ai quitté ma patrie et m'ont délivré le message que je viens de transmettre à cette assemblée mondiale. Je suis sûr que vous, représentants des nations de la terre, vous saurez comprendre mes mots. C'est notre confiance en nous-même qui renforce notre foi dans les grandes valeurs de l'humanité, dans la certitude que ces valeurs prévaudront et ne pourront jamais être annihilées. 

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