"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
vendredi 8 mai 2015
Non à une France belliciste, par Christian Darceaux
Certains s’inquiétaient des propos de François Hollande quand il affirmait en conférence de presse quelques jours après les attentats:« L’esprit du mois de janvier 2015, c’est l’unité de la République». Cette instrumentalisation d’une émotion légitime laissait présager les pressions pour l’acceptation des guerres actuelles et à venir, ou en tout cas pour désamorcer les protestations.
Les opposants aux choix militaristes seraient ainsi désignés comme des briseurs d’unité républicaine, voire comme une cinquième colonne. Rappelons-nous Valls en décembre 2012 déclarant « Cet ennemi intérieur, nous devons le combattre. ».
L’actualité leur donne hélas raison. L’annonce qui vient d’être faite, d’une augmentation de 3,8 milliards d’€ de la loi de programmation militaire pour la période 2014-2020, surfe sur cette ligne directrice. Il faut ajouter à cette somme les dépassements budgétaires certains sur les Opex (opérations extérieures) dont les dépenses sont toujours sous-estimées. Sous-estimer le coût des Opex est une technique déplorable qui permet de diminuer la prévision de déficit affichée lors de la présentation du budget à l'automne. La Cour des Comptes l’a relevé. Ainsi l'enveloppe de 2014 a plus que doublé. Au lieu des 450 millions prévus, le coût budgétaire des opérations extérieures s’est élevé à 1,13 milliard d'euros.
Le gros demi-milliard manquant a fait l'objet d'un financement interministériel. En clair, ce sont les autres ministères qui ont dû puiser dans leurs crédits, les usagers et agents des services publics apprécieront.
Alors que la moyenne européenne des dépenses militaires est à 1,7 % du PIB, celles de la France se situent à 2,6 %, c’est le 2ème budget de la Nation. Une partie de ces dépenses supplémentaires va alimenter le dispositif « Sentinelle » qui est avant tout une opération de communication destinée à la fois à créer l’angoisse et à rassurer à bons comptes. Cela fait jouer à l’armée un rôle qui n’est pas le sien.
Dans le même temps, le gouvernement réduit les moyens de la santé, de l’éducation, de la culture ou du logement, produisant une insécurité sociale croissante. Ainsi, nous disent les médias, « F.Hollande a arbitré ». Etrange conception de l’arbitrage, ou un président va-t-en guerre prétend se situer au dessus de la mêlée.
Cette militarisation croissante de notre économie et de notre gouvernement s’appuie sur une antienne répétée à satiété : il faut lutter contre le terrorisme, défendre la démocratie, aller au secours des populations menacées. Ce n’est pas de cela dont il s’agit. Parler de néocolonialisme et d’impérialisme est plus proche de la réalité.
L’analyse des interventions récentes au Sahel, au Proche-Orient et en Libye nous rappelle pourtant que les conséquences sont souvent pires que les problèmes qu’elles sont censées régler. Mais de cela, notre gouvernement n’en a cure.
Si des soudards français se livrent, comme il semble s’avérer en République Centrafricaine, à des crimes sexuels, il suffit de déclarer qu’on se montrera « implacable », et le tour est joué. Comme le souligne l’association Survie : « Bien d’autres cas d’exactions ont pourtant montré que, ne faisant pas exception aux autres armées, les soldats français pouvaient se rendre coupables de crimes lors d’opérations, parfois sur ordre de leurs supérieurs. » L’impunité est la règle générale.
Et Survie renchérit « la décision des autorités françaises d’avoir accepté l’ouverture d’une instruction judiciaire ne doit pas masquer que, depuis la Loi de Programmation Militaire (LPM) votée en 2013, le parquet - dépendant de l’exécutif - a désormais le monopole des poursuites. Le principe de séparation des pouvoirs a volé en éclats concernant les crimes commis par les militaires français en opération : une plainte des victimes se constituant partie civile ne suffit désormais plus à déclencher une enquête (article 30 de la LPM publiée au Journal officiel le 19 décembre 2013) ».
Les situations de chaos créées peuvent au contraire justifier de nouvelles interventions, de nouvelles occupations militaires. Le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian, par exemple, continue quant à lui à ne voir la Libye qu’à travers le prisme du terrorisme et d’une nouvelle intervention militaire internationale dans ce pays.
F. Hollande et ce gouvernement se moquent de ceux qu’ils sont sensés représenter. 73 % des Français se prononcent pour une baisse des dépenses militaires en France. C’est ce que met en évidence une étude d’opinion réalisée par l’IFOP pour le Mouvement de la Paix avec l’Humanité et qui montre que le budget de la défense est le premier que les Français accepteraient de baisser.
Il n’est pas du tout rassurant pour la démocratie, pour l’avenir de notre pays de voir les militaires et leurs préférences prendre une telle place dans les orientations économiques et diplomatiques de notre pays.
La présence de F. Hollande, « invité d’honneur » au sommet des pays du Golfe qui sont intervenus au mépris du droit International en bombardant à outrance les populations du Yémen est tout un symbole. Elle n’est en rien un honneur pour notre pays. Tout comme la vente de nos armes à ces dictatures qui, de plus, sont souvent des soutiens aux fondamentalistes que nous prétendons combattre.
Le refus de ces orientations dangereuses doit monter en puissance, c’est de l’avenir de notre démocratie, ou de ce qu’il en reste, qui est en jeu.
Christian Darceaux (Ensemble!)
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