mercredi 24 juin 2015

Télétravail dans la fonction publique : quelques appréciations sexuées, par Aline Chitelman

Un projet de décret est en cours d’écriture sur le télétravail dans la fonction publique. Il concerne les 3 versants de la fonction publique, d’état, des collectivités territoriales et hospitalière. Il concernera les fonctionnaires, les agents publics civils non fonctionnaires et les magistrats. Il pourrait concerner 50% du temps de travail. 

En réalité, dans certains services, le télétravail existe déjà. Le télétravail, c’est l’exécution d’un travail qui aurait du être effectué dans les locaux de l’employeur, hors de ces locaux, de façon régulière, en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Son statut est plus ou moins bien encadré.


Ce qui est en jeu dans le télétravail, c’est l’explosion des limites vie professionnelle/vie privée, l’isolement et le risque d’individualisme accru, la fin du travail en équipe. 

Quelques exemples : j’ai du mal à faire garder mes enfants, je demande à bénéficier du télétravail. Ainsi je jongle un peu plus sur mon temps de vie, je sais si bien faire plusieurs choses à la fois ! J’accumule du stress. En fait, je fais plus d’heures que si j’étais dans l’entreprise. Bonjour l’amélioration des conditions de travail. Et mon employeur peut à tout moment vérifier si je suis bien devant mon boulot. Bonjour la liberté. (la revendication du droit à déconnexion est toujours d’actualité). 

Mais c’est tout bénéfice pour l’employeur (est-ce vraiment du travail si c’est à domicile ?) et pour la collectivité qui pourrait prendre prétexte de cette possibilité pour éviter de construire des crèches. 

Il n’est pas besoin de s’appesantir sur l’isolement, qu’en-est-il si je rencontre des difficultés ? Comment les collègues qui sont sur le lieu de travail vont apprécier des demandes d’aide qui interrompent leur propre travail ? Sans compter que les discussions à distance sont moins fructueuses que la réflexion collective d’une équipe de travail. Et que la co-formation des équipes, sans la présence de la totalité de ses membres va être plus difficile. 

On constate bien déjà, avec le temps partiel, la déperdition d’information pour celles et ceux qui ne sont pas présent-es. 

Pour les personnes handicapées, quels matériels ergonomiques pour le travail hors du lieu de travail ? Déjà confrontées aux difficultés propres à chaque pathologie, elles seront encore plus coupées des relations sociales. 

Enfin, comme dans de nombreuses entreprises, le télétravail relève-t-il vraiment du libre choix ou d’une impossibilité de faire autrement ? Si les négociations en cours visent à préciser les garanties individuelles, elles ne permettront pas aux femmes d’éviter les écueils évoqués. 

Car le télétravail concerne bien plus les femmes que les hommes, qui préfèrent le plus souvent, quand à eux, rester sur les lieux où ils peuvent se montrer à l’employeur et qui, quelles que soient leurs charges de famille, font d’abord leur carrière. Les statistiques sont là pour le confirmer : qui prend une disponibilité pour élever ses enfants ou se met à temps partiel pour gérer les emplois du temps de ceux-ci ? 


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