lundi 21 décembre 2015

"Un processus long de construction est indispensable", par Jean-Jacques Boislaroussie


La nouvelle donne politique après les attentats du 13 novembre et les élections régionales percute l'ensemble des courants de gauche. Elle confirme la dégradation des rapports de forces politiques pour notre camp. 

Les coordonnées principales en sont connues :

- après les choix libéraux, le tournant autoritaire pour l'exécutif, et la réactivation du projet de constitution d'un bloc aujourd'hui et peut être demain d'une force politique "démocrate et républicaine", assumant pleinement les orientations libérales de l'Union Européenne et les contre-réformes sociales qu'elles impliquent 


- la confirmation de la structuration tripolaire du champ politique et l' installation du FN/RMB comme alternative potentielle. 

- la marginalisation de tous les courants à gauche du PS, quelles qu'aient pi être les orientations et tactiques mises en oeuvre, démarcation radicale pour LO, configurations diverses pour les organisations du FdG ou EELV. 

Cette configuration politique renvoie à des mutations sociales et idéologiques profondes; de la montée du darwinisme social au détriment de l'exigence de solidarité, à la désagrégation des derniers acquis de l'Etat-Providence et des solidarités sociales.

La vision ne doit cependant pas être univoque. Ainsi les mobilisations très diversifiées autour de la COP 21 témoignent de l'existence d'un courant sociaux porteurs d'une critique éthique et en actes du capitalisme et du productivisme. Ces secteurs sociaux ne se perçoivent pas comme "orphelins" d'une représentation stable dans le champ électoral et institutionnel. Aussi l'échange avec eux ne peut se faire à ce stade par la co-construction d'un débouché politique, mais par l'action en commun. 

Ensemble reste encore assez largement extérieur a ces secteurs.

Pourtant l'enjeu est important, entre autres pour prendre pied dans la jeunesse. De même l'analyse de la montée du FN ne peut être univoque. Le faisceau d'éléments qui contribue à son ascension est connu : racisme et xénophobie, aspirations à un Etat autoritaire et au retour à l'Etat-Nation, menaces que fait peser le libéralisme globalisé sur de larges couches sociales, crise historique de la représentation politique, réorganisation territoriale marginalisant les périphéries.. 

Cependant le FN a encore été battu aux régionales. Le soulagement n'est pas de mise, mais l'héritage démocratique reste encore un rempart, en outre, comme en témoigne l'engagement du MEDEF dans la campagne, le capitalisme globalisé s'oppose, à ce stade à la perspective d'une intégration du FN/RMB à une alternative politique. 

 En revanche la force de l'extrême droite comme (seule) expression politique antisystéme et la contamination autoritaire et raciste qu'elle induit vont peser dans l'avenir. L'évolution et les issues possibles la crise à gauche seront des éléments déterminants. Et un processus long de construction est indispensable. 

La première question posée est celle du rassemblement dépassant le clivage droite.gauche que défendent Hollande et Valls. Son objectif est double : porter jusqu'au bout et sur la base d'un assez large consensus les contre-réformes libérales, et bloquer la montée de l'extrême-droite. L'aboutissement d'un tel projet passe par la liquidation du PS et va réactiver les contradictions au sein de ce parti et chez ses alliés. Cécile Duflot a, à sa manière, tenté d'allumer un contre feu en proposant un pacte écolo-social renvoyant aux présumés fondamentaux de 2012 et actant l'urgence de mettre en oeuvre les orientations de la COP 21, démarche limitée mais à même de trouver des appuis au sein du PS. 

Ensemble travaille à la fondation d'un projet de gauche émancipateur, écolo, social, démocratique/autogestionnaire. De ce point de vue nous devons réaffirmer notre orientation en faveur d'échanges politiques et de rassemblements larges sur des contenus offensifs. 

A court terme une telle démarche : 

- restera largement "hors-sol social" eu égard au reflux des mobilisations et du non investissement de secteurs sociaux refusant la co-construction avec les organisations politiques 

- sera un temps limitée en terme de périmètre politique (le FdG si tout va bien, mais pas à coup sûr, des courants les plus ouverts du NPA a des socialistes et verts de gauche...) ... 

Mais elle est nécessaire. L'élément qui pourrait lui donner une toute autre dimension serait une rupture significative, politique et organisationnelle au sein du PS. Une telle hypothèse reste très aléatoire avant les scrutins de 2017. Elle impliquerait alors de nous positionner sur la nature des contenus et des conditions permettant, dans une toute nouvelle configuration, de les porter dans la société et le champ politique pour reconstruire une perspective. Nous n'en sommes pas là ! 

Nous devons, par ailleurs, veiller à ne pas engager des processus de nature à nous empêcher de nous prononcer le moment venu en fonction du champ politique réel pour la Présidentielle. 

La candidature de Jean-Luc Melenchon, dont nous savons les limites tant en terme de démarche que de certains contenus, est mise en débat, et à ce stade seule identifiable. 

De mon point de vue, le seul élément majeur pouvant rebattre les cartes serait une rupture forte au sein du PS. 

Au delà des reconstructions politiques qui sont une de nos raisons d'agir, nous percevons bien qu'un long travail idéologique et politique est devant nous. De ce point de vue l'autolimitation n'est en rien facteur de crédibilité. 

Nous devons donc être de tous les cadres unitaires de résistance, et en même temps porter dans la société, sur les terrains de mobilisation, des perspectives ambitieuses autour de l'appropriation sociale, de la réduction du temps de travail, de la transition écologique, d'une citoyenneté intégrale pour toutes et tous et d'une démocratie active/autogestionnaire , et aussi participer aux initiatives qui les concrétisent modestes mais qui donnent espoir. 

Long chemin, à prendre sans attendre. 

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