Suite au viol et à l'assassinat d’une femme par son conjoint à Aigrefeuille , le Réseau d’Action féministe Uni (RAFU) a organisé un rassemblement mercredi 10 mai devant le Palais de Justice de Nantes, en hommage à Marion.
Ce premier rassemblement a permis de recueillir le témoignage de membres proches de la famille, et d’une femme qui a relaté son long combat contre le harcèlement dont elle a été et est toujours victime. Les récits étaient tous particulièrement émouvants.
Aline Chitelman
Nous vous invitons à lire ci-dessous l’intervention de la porte-parole de RAFU introductive à ce rassemblement :
« Le 17 décembre, à Nantes, des hommes ont frappé, jeté d’une voiture et trainé une femme dans les rues en plein après-midi, sur 2 km de Gloriette à la Cité des Congrès l’abandonnant entre la vie et la mort sur le pavé. Cet acte a suscité la réaction immédiate de féministes qui se sont mobilisées manifestant le 21 décembre devant le CHU de Nantes.
Se retrouvant autour de l’urgence d’aller plus loin dans la nécessaire constitution d’une force de réaction immédiate, ces féministes se sont rapidement réunies pour créer sur Nantes un réseau d’action.
Depuis ce réseau c’est constitué sous le nom de RAFU. Il regroupe actuellement des individues et des organisations: Oser le Féminisme, Ligue des Droits de l’Homme, l’asso Les Filles, Alfa, le Gasprom, le CIDFF, Ensemble!44, Solidarité Femmes, le Planning Familial, Féministes Plurielles, la FSU ?
Il a vocation à s’élargir et à s’étoffer.
Les situations d’alertes ne manquent malheureusement pas à Nantes et dans l’agglo.
L’objectif du réseau est de :
Lutter contre la banalisation de la violence sexiste
Renforcer notre capacité d’action collective face aux incessantes violences faites à toutes les femmes, à leur traitement judiciaire
Dénoncer les insuffisances des politiques publiques
Réinvestir l’espace public pour dire stop à la sidération, la léthargie, le déni, la banalisation, l’emprise
A chaque fois qu’une femme se fera agresser dans la rue RAFU se fera entendre. RAFU compte agir par l’interpellation, la formation, l’alerte et la veille.
Ce soir, nous avons de nouveau fait appel à vous pour témoigner de notre horreur et de notre tristesse à toutes et tous face à un nouveau féminicide commis samedi dernier. Une mère de famille de 41 ans a été tuée à son domicile, rue de Nantes à Aigrefeuille sur Maine, après avoir été battue et violée. Son concubin est en détention provisoire.
Presque chaque jour dans la presse, le harcèlement de rue, les agressions, les coups, les menaces, et jusqu’aux féminicides, sont reléguées à la rubrique judicière ou « faits divers ».
De par leur répétition, on peut difficilement admettre qu’il s’agisse de cas exceptionnels relevant d’un moment d ‘égarement.
De par les explications fournies lorsque ces « affaires » arrivent au tribunal on ne peut pas déduire que la boisson soit le motif de « dérapages » qui, par pure malchance, s’en prennent aux femmes.
Elle menaçait de Me quitter : tiens donc, la conjointe leur appartient et partir porte atteinte leur dignité ?
Elle avait obtenu que je ne vois plus Mes enfants : n’y a-t-il pas de motifs ayant conduit à cette mesure de précaution ?
Croit-on vraiment que les violences conjugales ne sont pas aussi des violences faites aux enfants qui assistent, impuissants, à cette situation, même quand ils ne subissent pas eux mêmes les violences?
Je passe sur tous les prétextes, mieux connus maintenant, dont le conjoint violent se targue pour justifier ses violences envers Sa conjointe.
Jeudi 9 février 2017 l’explication fournie laisse sans voix : elle ressemblait à Mon ex !
Et pourtant, ces hommes ne vivent pas en dehors de la société. Ils sont allés à l’école, ils ont côtoyé des collègues de travail, des voisin-es de palier, ils écoutent les informations à la radio ou à la télé, ils ont assisté à des matchs de foot ou joué à la pétanque.
C’est donc bien la société toute entière qu’il convient de questionner sur ce qu’elle fait, ou ne fait pas, pour qu’on en arrive là.
La moindre place faite aux femmes, au travail (inégalités de salaires persistantes), dans la vie courante (c’est le rôle de la femme de faire des enfants et de faire le ménage), dans la vie politique (quelles responsabilités donne-t-on aux femmes dans les assemblées ?), dans les religions (elles continuent à construire les différences entre les sexes), dans la presse (combien de femmes expertes interrogées, de tribunes écrites par des femmes), dans les manuels scolaires (n’a-t-on pas renoncé récemment aux ABC de l’égalité?), dans les magasins (les jeux pour filles et pour garçons ne sont pas dans les mêmes rayons, bien séparés, les roses pour les unes, les bleus pour les autres) et dans l’espace public (combien de publicités sexistes diffusées?), ce déni d’égalité entre les femmes et les hommes est encore bien présent dans notre société.
Qui pourrait croire que c’est sans conséquences sur les attitudes des hommes et des femmes ? Quand tout montre que ceux qui dirigent actuellement notre société résistent de toutes leurs forces aux changements ?
Que chaque avancée obtenue ne l’a été que grâce aux mobilisations. Et que les retours en arrière n’ont rien d’impossible, l’actualité internationale nous le démontre tous les jours. Tout comme les élections de dimanche en montrent les enjeux.
Au delà de l’actualité, questionnons les ressorts profonds de ces féminicides. Et pour finir je voudrais rappeler ce vieux slogan toujours d’actualité : le féminisme n’a jamais tué personne, la machisme tue tous les jours ».
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