Les élections françaises de 2017 se déroulent dans un contexte international lourd de tensions : arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis, interventionnisme de Vladimir Poutine, approfondissement des crises et des guerres au Moyen-Orient, attentats terroristes…
Le monde est secoué de bouleversements qui ne vont pas manquer de se développer dans les prochains mois.
La société française est elle-même travaillée par des tensions et des fractures multiples qui peuvent se concentrer dans une crise politique inédite dont la séquence électorale de 2017 peut être un moment de dénouement.
Les inégalités insupportables, le chômage et la précarité, la crise du travail, l’absence d’avenir en particulier pour les jeunes générations, le déclassement que subissent certaines catégories ou certains territoires… tous ces phénomènes travaillent en profondeur la société française.
Mais elle est aussi marquée par les regroupements contre la politique sécuritaire et le projet de déchéance de nationalité, comme les mobilisations du printemps 2016 contre la loi « travail » et les discussions qu’elles ont stimulées.
Plus largement, dans toute la société, sous des formes diverses, la recherche d’alternatives, les résistances aux régressions libérales et autoritaires, les solidarités nombreuses de citoyens anonymes envers les réfugié.es, la volonté d’inventer des solutions concrètes pour initier d’autres façons de vivre, de produire, de consommer… sont autant de germes d’une autre façon de faire société.
Cette opposition du plus grand nombre à la politique du gouvernement s’est traduite par le retrait du Président Hollande de la primaire et par la défaite éclatante de l’ex-Premier ministre Manuel Valls.
Le défi pour les forces de gauche qui ne renoncent pas à changer le monde est de se lier à toutes les aspirations progressistes, démocratiques, écologiques et sociales pour construire une alternative politique digne de ce nom.
Sans cela la crise politique pourrait se dénouer de façon totalement imprévisible, tant est fort l’épuisement des forces politiques institutionnelles.
À droite, François Fillon s’était imposé en leader de son camp sur un programme thatchérien qui vise à imposer un choc antisocial dès les premiers mois de son élection pour étouffer toute contestation (suppression des 35 heures, retraite à 65 ans, réforme du code du travail, réforme de l’assurance chômage et de l’assurance-maladie, suppression de dizaines de milliers de postes dans la fonction publique, hausse de deux points de la TVA…). L’arrivée d’une telle droite au pouvoir représenterait un danger extrêmement important pour les couches populaires.
La crise actuelle autour de sa candidature fait vaciller le camp de la droite, ce qui accentue le danger réel que représente Marine Le Pen.
Celle-ci s’appuie sur un électorat qui s’est enraciné dans de nombreux territoires. Le caractère imprévisible de la situation politique, la fragilité aujourd’hui de toute démarche politique existante, peut entraîner son arrivée au pouvoir en mai prochain. Un tel événement serait un véritable séisme aux conséquences politiques, économiques et géopolitiques de grande ampleur.
La candidature d’Emmanuel Macron se met en position de regrouper des secteurs de la droite et du centre ne se reconnaissant pas dans François Fillon, et des secteurs de la gauche gouvernementale qui recherchent depuis des années un rapprochement de tous les libéraux « modérés » au-delà du clivage droite-gauche, comme l’ont fait avant eux de nombreux partis de la social-démocratie européenne. En restant dans le flou sur son programme, il ancre sa campagne sur le renouvellement, la modernité et l’aspiration à la réussite individuelle, et veut se présenter comme le seul vote utile pour empêcher un 2° tour Fillon/Le Pen. Macron défend la poursuite – et l’aggravation – de la politique de François Hollande, qui n’aurait pas été assez loin dans la libéralisation de la société française, tout en ayant réussi à se démarquer du bilan catastrophique du quinquennat. Nous devons veiller à faire échouer cette offensive idéologique et en mettre au jour les mensonges dès qu’il dira « son programme ».
Cette situation pose des défis majeurs aux forces de gauche qui veulent construire une alternative.
Benoît Hamon a remporté la primaire de la Belle Alliance Populaire et devient le candidat du Parti Socialiste. Après le retrait de François Hollande, la défaite de Manuel Valls constitue une défaite pour les partisans de l’austérité. C’est un événement considérable, effet différé du mouvement social du printemps contre la loi El Khomry.
Il existe une dynamique et une aspiration à gauche pour sanctionner les représentants de la politique gouvernementale : en soutenant et en appuyant pour beaucoup la candidature Jean Luc Mélenchon, et/ou en se mobilisant malgré tout dans une primaire organisée par le PS dans des conditions qui étaient taillées sur mesure pour essayer de valider Hollande ou Valls.
Dans les deux cas, (affluence aux meetings de JLM et soutien marqué dans les sondages, meetings de Hamon et votes pour lui à la primaire), différents secteurs d’un même électorat de gauche ont cherché une issue vers une alternative, démontré une aspiration à des solutions politiques nouvelles, une volonté de résister à la droite et à l’extrême-droite.
Cet événement renforce la légitimité des idées de transformation sociale et écologique. Mais Benoît Hamon est maintenant confronté à la contradiction entre l’aspiration de ceux qui ont voté pour lui pour tirer un trait sur le quinquennat Hollande et la logique de la primaire du PS qui pousse à rassembler les partisans et les adversaires de l’austérité au sein du PS. Il est décisif que cette contradiction soit clarifiée et la rupture avec le social-libéralisme confirmée.
« Ensemble ! » a toujours été partisan du dialogue politique entre les forces du Front de gauche, avec les écologistes, avec les socialistes, la gauche radicale qui cherchent une véritable alternative à Hollande, Valls et Macron. C’est ce que recherche le peuple de gauche pour s’opposer efficacement à la droite et l’extrême-droite, et mettre en minorité les politiques sociales-libérales. Nous poursuivons notre investissement dans l’Appel des 100.
« Ensemble ! » s’est mis en campagne en soutien à la candidature de Jean-Luc Mélenchon pour défendre une orientation de rupture avec le productivisme et le libéralisme et pour rassembler toutes les forces de gauche et écologistes qui partagent cette exigence et remobiliser toutes les énergies au sein des classes populaires qui aspirent à un véritable changement.
« Ensemble ! » propose que dans un premier temps, les différentes forces politiques et mouvements citoyens (France Insoumise, PCF, Ensemble !, groupes locaux, personnalités…) qui soutiennent la candidature de Jean Luc Mélenchon constituent à l’échelle locale comme à l’échelle nationale un cadre national de campagne pour donner un nouvel élan à la dynamique engagée et surmonter le risque de divisions aux élections législatives. En ce sens nous poursuivons notre engagement dans Front commun.
« Ensemble ! » propose que les trois candidatures à gauche, et les forces en accord avec cette démarche, se rencontrent pour examiner quelles convergences sont possibles en vue d’un « Pacte pour une alternative de gauche », visant à rassembler tous ceux qui veulent en finir avec le bilan désastreux du quinquennat Hollande, et veulent redéfinir un projet mobilisateur pour faire front face à Fillon, Macron et Le Pen.
Dans ce cadre, Ensemble ! propose de multiplier les initiatives locales associant les forces politiques, le mouvement social, les forces citoyennes, notamment sous la forme de débats publics.
Ensemble souhaite que Jean-Luc Mélenchon se fasse le porte-voix de cette proposition de rassemblement et qu’il s’adresse en ce sens à Yannick Jadot, Benoît Hamon et à toutes les forces sociales, politiques qui partagent cet objectif.
Cette proposition de « Pacte pour une alternative de gauche » serait centrée principalement autour de quelques grandes exigences qui peuvent être majoritaires dans le pays et qui sont déjà des points de convergence possible entre les trois candidatures concernées :
• La mise en place d’une VIème République et d’une assemblée constituante pour construire une véritable démocratie à l’échelle des territoires, des entreprises et du pays
• La rupture avec les politiques d’austérité et les politiques pro-patronales (abrogation du CICE, de la Loi Travail, etc.) pour donner la priorité, à l’égalité hommes femmes, aux besoins sociaux et écologiques, et la reprise des discussions sur les progrès à faire au profit des salarié.es et de tou.te.s, chômeurs, précaires … Garantir un droit de regard des salariés sur ce que produit leur entreprise, un droit de préemption sur leur avenir
• La construction d’une Sécurité Sociale Intégrale, basée sur un système de cotisations et de répartition en prenant sur les profits, qui permette d’en finir avec le chômage et la précarité et qui prévoit : la continuité du revenu entre période d’emplois, recherches d’emplois et de formation, une conférence citoyenne pour aller vers une sécurité sociale professionnelle ; la réduction du temps de travail, vers les 32 heures hebdomadaires, sans perte de salaires et avec embauche, l’égalité professionnelle entre hommes et femmes.
• La mise en route d’une politique de développement non productiviste assurant une véritable transition écologique, s’engageant à une sortie du nucléaire. En finir avec les grands travaux inutiles ou anti-écologiques, tel l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, le bétonnage immobilier et consulter la population avant le lancement de tout projet.
• La rupture avec les traités de l’Europe libérale actuelle au service de la finance, qui obligent à respecter le dogme austéritaire des 3 % de PIB, pour refonder, autour de nouveaux traités, une autre Europe, sociale, démocratique, écologique, contre les replis nationalistes, austéritaires et xénophobes.
• La priorité donnée à la paix et à la justice pour les peuples, en refusant tout alignement sur la politique étrangère des grandes puissances, en agissant pour réduire le surarmement face aux dangers de guerre.
• Le développement d’une politique pour l’égalité et pour de nouveaux droits, contre les discriminations et les divisions, pour l’accueil des réfugiés. Défendre le droit des femmes à la contraception et à l’avortement face à tous ceux qui veulent les remettre en cause.
C’est autour de ces exigences qu’un large rassemblement peut se construire pour la présidentielle comme pour les législatives. C’est aussi autour d’un tel « Pacte pour une alternative de gauche » que peut être posé l’objectif d’une majorité nouvelle à l’assemblée, qui rompe avec l’austérité et résiste à une hégémonie de la droite et du FN.
Divisées, les candidatures de la gauche d'alternative n’ont aucune chance d’être présentes aux seconds tours, si elles s'unissent autour d'un projet commun, elles gardent la possibilité de rompre avec le social libéralisme, de battre la droite et le Front national.
Le 5 février 2017.
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