samedi 8 mars 2014

Il était une fois la social-démocratie... par Jean-Jacques Boislaroussie


Les partis se réclamant de la social-démocratie sont depuis longtemps confrontés à l’épuisement de leur modèle ancien de compromis social. Ce modèle visait, en s’appuyant sur des rapports de forces sociaux et politiques, en Europe comme au niveau international, à imposer une répartition des richesses permettant la progression du niveau de vie des classes populaires et la consolidation des acquis collectifs de l’Etat-providence. 

Le capitalisme financiarisé et mondialisé n’est pas prêt à de tels accords. Dans les faits, les partis s’affirmant "sociaux- démocrates" sont donc en recherche d’improbables compromis gagnant-gagnant avec les forces du capital, et en réalité, le plus souvent, négocient des régressions sociales. Le PS ne fait pas exception. 


Certains aspects du projet de l’ancienne social-démocratie transformatrice sont désormais présents dans le programme "l’Humain d’Abord" du Front de Gauche, comme ils le furent, au début des années 80, dans le Programme Commun de la gauche. 

Le positionnement de Hollande est d’abord une mise en cohérence des actes et de la proposition politique. Cette mise en cohérence est forte sur le plan symbolique,car elle remet en cause une ambiguité jusqu’ici assumée par le PS ; Un tel tournant devrait, en bonne logique, conduire a une redéfinition des alliances politiques. Et, dans les faits, tout rapproche la politique suivie par Hollande et son gouvernement du projet présenté par François Bayrou à la Présidentielle. 

On doit cependant se souvenir que les tournants stratégiques du PS, pour se construire pleinement, prennent du temps. Ainsi, il fallut une quinzaine d’années pour passer des premiers accords électoraux entre le PCF et la SFIO (ancêtre du PS) aux Municipales à l’élection de François Mitterrand en 1981. La poussée des droites extrêmes, l’alignement libéral du PS peuvent cependant conduire à des processus plus rapides de réorganisation du champ d’alliances du parti au pouvoir. Celle-ci passerait par une renonciation explicite y compris au niveau local, à la référence, de plus en plus symbolique il est vrai, aux alliances à gauche.

La logique ultime du processus serait d’ assumer une forme de bloc politique centriste, en osmose avec les projets de l’Union Européenne libérale. 

La gauche alternative est de longue date confrontée à la nécessité d’un nouveau projet de transformation. Nous l’articulons notamment autour des dynamiques citoyennes et autogestionnaires, y compris sur les terrains de l’expérimentation , de l’égalité des droits, de la réduction forte du temps de travail, de l’appropriation sociale, de la transition écologique. 

Un PS assumant jusqu’au bout son nouveau cours conduirait a réviser des éléments clés des stratégies anciennes à sa gauche. Impasse pour les stratégies d’alliance conflictuelle du PCF, mais aussi pour celles, plus ou moins théorisées et mises en pratique, de front unique/débordement des gauches radicales.

Il nous faudrait à la fois aider à l’émergence du projet, du bloc social, et des alliances politiques en mesure d’aider à son accouchement. Et ce, dans une période de divisions profondes au sein des classes populaires, un temps ou se mêlent colères et résignation. A dire vrai, ces défis sont devant nous, même si le PS, pour un temps encore, n’assume pas pleinement le tournant de Hollande. 

Jean-Jacques Boislaroussie (Edito de Rouge et Vert 376).

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