dimanche 9 mars 2014

Ukraine : de l'Etat vassal de la Russie à une communauté nationale démocratique, par Vladimir Fisera


Le mouvement anti totalitaire, anti domination russe et anti corruption de la Place de l'Indépendance (Maïdan en Ukrainien) à Kiev a donc été victorieux le 21 février 2014, 24 heures après le massacre de 90 de ses partisans par les forces spéciales du dictateur, 90 personnes, tuées par balles au coeur de l'Europe. 

En riposte, dix jours plus tard 15 000 soldats russes surarmés mais sans insigne sur leur uniforme transportés par des camions kaki Kamaz aux plaques militaires russes occupaient la Crimée; dès le 5 mars cette presqu'île de 2 millions d'habitants était verrouillée par une nouvelle frontière "internationale" à Armiansk, isthme resserré à son extrémité nord. Annexion de fait, qui est moins une tête de pont qu'un Fort Chabrol organisé par Moscou. 


Comme à Kiev et c'est la leçon des trois mois de lutte, les gens se connaissent désormais, savent s'organiser dans l'urgence et la clandestinité et avec internet. Le mouvement civique ukrainien qui inclut une partie importante des russophones natifs ne cesse de se renforcer depuis 1991 visant l'indépendance nationale et tout autant le pluralisme. C'est l'affirmation de valeurs d'auto expression indépendante de l'obéissance à un Etat-Empire qui veut limiter la culture politique à des valeurs de survie. 

Y contribuent la nature pluraliste du gouvernement provisoire et en parallèle le maintien du mouvement de la Place Maïdan organisé de manière autonome et sur la base d'AG et de comités révocables, dont sont issus trois ministres. Ses diverses composantes -sociale, linguistique, religieuse, laïque - sont cimentées par l'expérience de ces 3 mois. 

S'y ajoutent la coordination des assemblées du peuple en province, la mobilisation d'une armée d'appelés et de volontaires, et la retenue non violente mais ferme face à l'occupation de la Crimée. 

Pour éviter tout nationalisme ethnique il faudra juger au plus tôt les responsables des violences et exproprier kleptocrates et oligarques et fédéraliser le pays. La tradition de Nestor Makhno et de son Armée Révolutionnaire des Insurgés de l'Ukraine 1918-21 qui affronta les Blancs et empêcha l'intervention étrangère et l'expansion des Bolcheviks russes, est réhabilitée. En effet cet allié de toujours de l'Armée rouge russe et libérateur de la Crimée en 1920 a vu sa commune ukrainienne anarchiste anarchiste paysanne écrasée dans le sang quelques semaines plus tard par l'Etat bolchevik russe. 

Or aujourd'hui Makhno, enterré au Père Lachaise en 1934, a en Ukraine ses statues et ses plaques, ses partisans paysans et étudiants; ses oeuvres écrites en russe sont enfin publiées en ukrainien. Son destin est bien décrit par l'historien russe Vassili Golobanov dans le premier livre qui lui soit consacré à Moscou (2013): "il ne voulait pas être l'exécutant servile d'une volonté étrangère... Il insistait sur le principe de l'auto-organisation spontanée de la société.

Vladimir Fišera (in Rouge & Vert)

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