"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
jeudi 24 juillet 2014
Myriam Martin : « On ne peut pas s’allier avec ceux qui valident l’austérité » - entretien à Politis
Face aux effets démobilisateurs de l’action du gouvernement, Myriam Martin se dit déçue par l’action des frondeurs du PS et invite les forces de gauche à adopter une position commune claire et radicale.La porte-parole d’Ensemble !, troisième composante du Front de gauche, clôt notre série d’entretiens avec les représentants de la gauche « de gauche ». Pour elle, le rassemblement n’aura pas lieu sans une nécessaire radicalisation.
Quel regard portez-vous sur cette gauche au pouvoir ?
Myriam Martin : C’est une aberration de dire que ce gouvernement est de gauche alors qu’il fait une politique qu’aurait pu mener le pouvoir sarkozyste : une politique libérale, obsédée par cet horizon indépassable qui consiste à vouloir résoudre la crise du capitalisme par l’austérité, et qui ne conduit à rien d’autre qu’à contracter toujours plus l’économie et à accentuer la crise ! Mais le plus inquiétant, et on l’a vu lors des élections municipales et européennes, c’est que cette politique a un effet démotivant : les gens n’y croient plus, ou pire, sont dégoûtés.
Je travaille dans le milieu enseignant, où les gens sont d’ordinaire très engagés, politisés, syndiqués, et je constate chaque jour combien cette « gauche » donne une image catastrophique de la politique. Je crains que ce social-libéralisme, qui ne peut plus se revendiquer d’un héritage, même récent, des valeurs de la gauche, contribue, comme en Italie, à faire disparaître la « vraie » gauche. Bref, je tire un bilan très négatif de ces deux dernières années, et je veux sonner l’alarme : il faut agir avant qu’il ne soit trop tard. Pour l’instant, la stratégie « autonomiste » a été un échec – au moins – électoral…
Pourquoi le Front de gauche a-t-il plu à des millions de gens au moment de la présidentielle ?
Non seulement parce qu’il incarnait les vraies valeurs de gauche, de justice sociale, de résistance, de solidarité, mais aussi parce qu’il proposait quelque chose de novateur dans sa manière de faire de la politique : il portait la promesse que des organisations, avec des histoires et des pratiques différentes, réussiraient à s’unir. Or, cet espoir a été déçu. Le Front de gauche n’a pas su se dépasser et a échoué à proposer une organisation politique nouvelle aux militants qui l’avaient rejoint et soutenu. Il y a un autre problème : c’est que cohabitent deux orientations incompatibles entre ceux que cela ne dérange pas d’être associés à cette gauche libérale et les autres. Moi, je pense qu’il faut vraiment tracer un chemin indépendant, dire qu’il y a une vraie alternative à gauche.
Répéter que « l’humain d’abord » est en opposition radicale avec la politique actuelle. Il y a donc un intérêt à s’adresser aux courants critiques des Verts et du PS, mais seulement s’ils prennent vraiment leurs distances avec la politique au pouvoir. Pour ma part – je partage cet avis avec le Parti de gauche –, j’ai été déçue par la fronde des députés socialistes qui n’ont pas voté contre le collectif budgétaire, le PLFRSS, et la loi ferroviaire. Les députés PS disaient « vous allez voir », on n’a pas vu grand-chose. Il faut donc discuter avec d’autres formations d’un pacte alternatif aux politiques austéritaires, mais on ne peut pas faire alliance avec ceux qui valident les politiques d’austérité.
Il faudrait que les frondeurs sortent du PS pour que le Front de gauche entame des discussions avec eux ?
Il n’est pas possible qu’ils discutent à la fois avec nous et avec ceux qui continuent à nous mettre la tête sous l’eau. Ils doivent être clairs : quand on est contre l’austérité, il faut s’opposer au collectif budgétaire de manière offensive. Par ailleurs, on ne va pas se plier à ce que demandent les Socialistes affligés ou Gauche avenir. Si on discute, c’est d’égal à égal. Le PS fait des appels du pied au PCF et aux Verts. Si le PCF accepte de se rassembler avec le PS, va-t-on vers la mort du Front de gauche ? Nous sommes en effet à un moment charnière. Pour toutes les composantes de la gauche, d’ailleurs. Au PCF, les choses ne sont pas tranchées : il y a beaucoup de débats et de positions variées au sein du parti. Moi, j’estime qu’on ne peut pas tirer les deux bouts quand les deux bouts s’écartent, que le PCF ne peut pas s’allier avec des gens qui mènent des politiques qu’il combat à nos côtés ! Je souhaite simplement rappeler au PCF qu’il appartient à un front commun qui s’appelle le Front de gauche, et que les votes des députés communistes sont absolument contradictoires avec ce que fait le PS.
Comment envisagez-vous la rentrée pour le Front de gauche ?
Outre l’université d’été d’Ensemble !, fin août, le conseil national du Front de gauche, le 6 septembre, et la Fête de l’Huma seront des moments forts pour discuter de l’avenir du mouvement. Cela nous fera du bien à tous d’avoir pris un peu de recul. Les militants, je crois, sont très attachés à l’union du Front de gauche, mais aussi à une certaine radicalité, à une ligne claire, précise, qui a fait sa force, et qu’il ne faut pas gâcher.
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