"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
vendredi 31 octobre 2014
Les chiens de la défunte République, par Hélène Duffau*
Il y a quelque chose de pourri au royaume de France. Quelque chose d’odieux qui monte insidieusement. Quelque chose de malsain qui ressemble au fascisme sans en endosser le nom. L’autoritarisme d’une meute de mâles dominants. Arc-boutés sur leurs mensonges, phagocytés par leurs trahisons et leur coercition d’éternels « obligés ».
Il y a quelque chose de pourri au royaume de France quand, pendant trois ans, un collectif de sauvegarde demande la discussion sur le sujet controversé d’un projet de barrage qui pue la magouille, sans jamais obtenir la moindre audience.
Quelque chose de pourri quand, au royaume de France, un conseil général flanqué de l’État décrète le lancement de travaux alors que des décisions de justice sont en instance.
Pourri quand ces institutions continuent d’ignorer l’appel de citoyens éclairés dont les démonstrations seront confirmés, trois ans plus tard, après l’étude qu’une ministre aura enfin diligentée.
Quelque chose de pourri au royaume de France quand les ordres sont donnés à des escouades de gendarmes, CRS, sections d’intervention, de gazer, d’humilier, de tabasser des opposant.es en nombre systématiquement inférieur, ni équipé.es ni entraîné.es, si peu protégé.es, évitant l'asphyxie à la lacrymo en protégeant leur visage d'une écharpe, d'une cagoule.
Quelque chose de pourri quand des hommes qui mettent leur vie en danger en se privant des jours durant de nourriture, pour être enfin écoutés, sont moqués par le président du conseil général qui les tient à distance médiatique.
Quelque chose de pourri quand, alors que le mouvement d’opposition perdure et se renforce, le même président use d’argent public pour le diffamer massivement, à l’aide de communiqués et de publi-reportages qui évitent systématiquement les questions de fond.
Quelque chose de pourri quand, probablement renseigné sur l’ampleur du rassemblement national du 25 octobre, l’État-conseil général organise la discorde en laissant sur le site, d’abord du matériel de travaux, puis des gardes mobiles, alors qu’il en avait été convenu autrement.
Quelque chose d’ignoble, dès le lendemain de l’assassinat de Rémi, quand, au fil des dépêches matinales se profile le camouflage d’une « bavure » policière.
Pourri quand on essaie de faire passer un mort pour un criminel, répandant le doute et la rumeur pour tenter de couvrir un dossier véreux, des agissements hors-la-loi, des violences avec usage d’armes non réglementaire répété sans fin.
Il y a quelque chose d’indécent au royaume de France quand le meurtre d’un étudiant vient réveiller les consciences, attiser la haine contre les opposants, attirer enfin massivement les médias.
Quelque chose de scandaleux quand le mouvement des opposants est accusé de tous les maux, alors qu’il manifeste sa colère et dénonce les violences policières.
Quelque chose du deux-poids deux-mesures quand les agriculteurs en colère saccagent Albi et que des protecteurs de la planète dénoncent l’arbitraire à Gaillac - deux villes tarnaises.
Il y a quelque chose de d’ignoble au royaume de France, quand un chef de l’État, un gouvernement tout entier tombent dans l’aphasie, omettent de transmettre condoléances et signes d’empathie aux parents d’une jeune homme tué à 21 ans.
Quelque chose de pourri au royaume de France quand un politique en délicatesse avec la justice aboie à la vindicte et se trompe sciemment de coupables. Quand d’autres rejettent la faute sur une femme courageuse qui a, elle, visité le site du barrage de Sivens, discuté avec les opposants, constaté les dégâts et les outrages, dénoncé l’absurde : merci Madame !
Quelque chose de pourri au royaume de France quand le président Carcenac ironise, face caméra, grossier et indécent, sur le fait qu’il est bête de mourir pour ses convictions, vraiment.
Il y a quelque chose de pourri quand au lieu d’étudier les dossiers pour se faire une opinion, de fouiller le net pour y étudier des images, des reportages, d’aucuns prennent position sur un sujet qu’ils ignorent, pensant asséner leur leçon comme la seule qui vaille.
Pourri quand, au lieu de s’exprimer sur le fond, ils réagissent sans réfléchir, évitant de considérer le sujet de l’utilisation de l’argent public, de la construction de grands projets inutiles, des conflits d’intérêt, du mirage de la transition énergétique dont on parle à tout va sans jamais l’instaurer. Quand, suivant le mode politique en vogue, ils grognent, ils dénigrent, ne sachant pas de quoi ils parlent.
Il y a quelque chose de pourri au royaume de France quand les chiens aboient en meute pour couvrir l’ordure d’un système parfaitement inacceptable.
Pour Rémi.
* Hélène Duffau est écruvaine. Ce billet a été publié sur son blog : http://blogs.mediapart.fr/blog/helene-duffau/281014/les-chiens-de-la-defunte-republique
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