Le mouvement Ensemble !, qui a très majoritairement voté en
faveur d’un soutien à la candidature de Jean-Luc Mélenchon pour la
présidentielle de 2017, souhaite développer un cadre commun sans
intégrer La France insoumise. Entretien.
42% des militants d’Ensemble se sont exprimés pour un soutien à
Jean-Luc Mélenchon tout en souhaitant poursuivre la construction d’un
large rassemblement de la gauche de transformation sociale et
écologiste. 30% ont voté pour une participation plus directe à la
campagne du candidat de la France Insoumise. Enfin, 25% ont considéré
que la situation n’était pas mûre pour se prononcer en faveur d’un
candidat.
Que démontre selon-vous ce vote ?
Clémentine Autain.
Au total, 72%, soit plus de deux tiers de notre organisation, a voté
pour soutenir Jean-Luc Mélenchon. Sur ce point essentiel, c'est un vote
franc et net. La candidature de Jean-Luc Mélenchon incarne aux yeux des
Français une gauche distincte du bilan de Hollande et Valls, une gauche
qui est porteuse de ruptures avec le néolibéralisme, une gauche de
transformation sociale et écologiste. Nous ne voulons pas d’un scénario
mortifère avec plusieurs candidatures issues de la gauche d'alternative.
Je pense même que nous pouvons nous fixer un objectif ambitieux avec
Jean-Luc Mélenchon : celui d’être en tête de la gauche.
Comment les militants d’Ensemble souhaitent-ils mener campagne avec la France Insoumise ?
Clémentine Autain. Suite
au vote, nous avons tenu à valider une motion commune à l’ensemble de
notre mouvement. Celle-ci nous engage concrètement dans la campagne de
Jean-Luc Mélenchon que nous voulons mener dans un cadre commun, large et
pluraliste, intégrant toutes les forces soutenant cette candidature :
la France insoumise, Front commun, mais aussi, s’ils le décident, ce que
j’espère vivement, le PCF et des courants écologistes.
Une rencontre
devrait avoir lieu de façon imminente entre la France insoumise et Front
commun (appel de citoyens et militants d’horizons divers qui souhaitent
soutenir Jean-Luc Mélenchon sans intégrer la France insoumise-NDLR),
afin que les mouvements politiques qui entendent soutenir cette
candidature puissent trouver leur place dans cette campagne. Des
propositions concrètes sur la Charte politique (proposée aux candidats
pour les législatives- NDLR) et la place des partenaires devraient être
avancées.
Ensemble souhaite-t-il travailler au programme qui sera porté par Jean-Luc Mélenchon ?
Clémentine Autain. Bien
sûr ! Mais quand on compare le programme l’Humain d’abord du Front de
gauche en 2012 et celui de l’Avenir en commun de la France insoumise
pour 2017, ce qui frappe, c’est la grande proximité des projets. Sur
l’essentiel, ce qui est défendu relève du même arsenal programmatique.
Il est évident que si de nouvelles forces s’impliquent, elles doivent
pouvoir l'enrichir ou discuter d’éventuels bougés. Je ne dis pas
qu'Ensemble est d'accord avec tout mais honnêtement, je ne crois pas que
les embûches et difficultés potentielles se nichent là...
Ensemble s’est exprimé pour la présidentielle et aussi pour les législatives ?
Clémentine Autain. Nous
avons adopté une feuille de route pour les législatives. Nous nous
battrons pour construire des candidatures unitaires partout où cela est
possible, en rassemblant toutes les forces qui veulent une politique de
gauche en opposition à l’orientation du gouvernement actuel. Nous
chercherons à éviter la division de la gauche de transformation sociale
et écologiste. C’est pour nous absolument déterminant.Nous estimons que
l’éclatement de nos forces serait tout à fait dramatique pour la famille
politique que nous représentons ensemble.
Nous entendons également
poursuivre notre rôle de passerelle avec les socialistes dissidents, les
écologistes, les mouvements sociaux, intellectuels, culturels
critiques, les espaces citoyens... Chacun voit bien que nous allons vers
de grandes recompositions politiques. Ensemble sera acteur du large
rassemblement nécessaire pour affronter les droites dures et ouvrir
l'espoir.
Que pensez-vous du risque d’élimination de la gauche dès le premier tour de la présidentielle ?
Clémentine Autain. Bien
sûr, nous aurions voulu que notre candidature à la présidentielle
rassemble plus largement encore. Mais force est de constater qu’EELV
aura son propre candidat, et que les socialistes critiques jouent le jeu
de la primaire avec le risque de soutenir in fine un candidat issu de
la ligne gouvernementale. Notre vote reflète la prise en compte de cette
réalité. L'échiquier politique comme le débat d’idées se polarisent
aujourd’hui à droite toute. Nous avons besoin d'une gauche mordante,
avec de l'odeur et de la saveur, pour renouer un lien de confiance avec
les milieux populaires et la jeunesse. Nous n'allons quand même pas
laisser le profil révolutionnaire à Emmanuel Macron et chercher notre
sauveur parmi les anciens ministres de l'ère Hollande !
Même si nous
avons des débats voir des divergences sur la méthode ou sur certains
partis pris de Jean-Luc Mélenchon, il ne faut pas perdre de vue
l’essentiel : l’état des rapports de force sociaux et politiques dans le
pays, qui ne sera pas le même si nous faisons un bon score en 2017 ou
si nous sommes dans les choux. Nous avons donc besoin d’un projet et
d’un candidat qui plante le drapeau de cette gauche franche dans le
pays, contestant le pouvoir du capital, le productivisme, visant
l’égalité et la démocratie. C’est cette gauche-là que nous avons la
responsabilité de faire grandir.
Peropos recueillis par Aurélien Soucheyre. Publié sur l'Humanité.fr
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