lundi 21 novembre 2016

Fillon n’est pas à l’image de la majorité de la société française, encore moins de ses forces vives, par Gérard Filoche

Thatchérien au plan économique et social avec une approche très « manif pour tous » au plan sociétal.  « Fillon est de fait en total décalage avec la majorité de la société française actuelle » ce qui plaide pour « un projet bien à gauche et de rassemblement de la gauche et des écologistes. 

Quand Fillon parle de limiter les migrants, il faut rappeler que 82 % des français se sont dits récemment et clairement favorables à leur accueil et seulement 18 % s’y montrent hostiles. 


Malgré les progrès relatifs des idées réactionnaires du FN, notre pays est une terre fraternelle, on l’ a vu dans les villages d’accueil où les opposants du FN étaient groupusculaires, la majorité étant ouverte et conviviale. 

Notre pays est à l’image de la grande manifestation du 11 janvier 2015 qui avait suivi l’horrible massacre de nos amis les dessinateurs de Charlie hebdo. Quatre millions de personnes y avaient participé avec chaleur, humanité, amitié, fraternité, aucun n’avait repris les appels à la peine de mort de Marine Le Pen, ni les tentatives de mobiliser contre les musulmans, ni les appels à l’unité nationale de Manuel Valls. Le climat de toutes ces manifestations était extraordinairement positif, c’est à dire ouvert, fraternel, constructif. On étaient tous pluriel et laïques. 

La majorité écrasante du peuple français est athée. Aucun rejet des blasphèmes de Charlie, aucune morale puritaine ne s’est manifestée contre eux dans les rues. Leur crayon a été brandi comme une arme à des millions d’exemplaires ! 

Nulle part il n’a été signalée une banderole avec « unité nationale » : la dominante n’était pas dans l’appel à la chasse au terrorisme, mais dans l’appel « Liberté j’écris ton nom ». Personne, absolument personne n’a demandé de s’armer comme au USA ni un « Patriot act » ni la peine de mort. Le ton n’était pas à droite, encore moins à l’extrême droite qui s’était naturellement exclue, il était à l’avenir, à la démocratie, à la fraternité. 

La suite de ça ? c’est un peuple qui veut plus d’égalité. Pas un peuple qui tombe dans l’abime des conflits de fratries, de religion, de culture, d’armement, de mesures d’exception ni d’inquisition, ni de sécurité ni d’austérité. 

La suite, c’est qu’il faut encore plus de budget pour l’éducation, pour la culture, c’est qu’il faut combattre les inégalités qui engendrent les haines. 

Il faut redistribuer les richesses, de meilleures écoles, de meilleurs logements, du travail, redonner du sens social, de l’espoir commun, collectif, à notre société : c’est l’exigence profonde et optimiste qui est ressorti de ces superbes manifestations de confiance qui ont eu lieu. 

Apres les attentats du vendredi 13 novembre, nous étions encore des millions à être visés : professeur, graphiste, informaticien, chercheur, serveur, restaurateur, juriste, éditeur, artiste, maquilleuse, étudiant, musicien, commercial, employé de banque, chauffeur, livreur, charpentier, communicant, administrateur, contrôleur des impôts, technicien, apprenti architecte, rugbyman, journaliste, avocat, douanier , programmateur, chanteur, sportive, rédacteur, brigadier… 129 morts, 350 blessés, ils venaient de Venise, de Suresnes, de Berlin, du Burkina Faso, de Neuilly, de Montpellier, de Normandie, du Congo, de Tarbes, de Marne-la-Vallée, d’Asnières, de Cherbourg, de Ceyrat, d’Epervans, du Maroc, de Belgique, de Biarritz, de Californie, de Lambersart, de Madagascar, du Chili, d’Espagne, d’Amiens, de Colchester, d’Algérie, de Bobigny, de Saint-Tropez, de Tonnerre, d’Alsace, de Gondecourt, de Nancy, de Sancerre, de Bagnolet, de Tunisie, du Brésil, de Suède, du Portugal, de Roumanie… renoi ou rebeu.. 21 nationalités, loin par-delà les frontières et le périphérique. (1) 

Ils étaient, nous étions, tous mélangés, car c’est ça notre République, elle n’est pas que tricolore, c’est ça notre pays, il est ouvert, accueillant, pluriel, multiculturel. Ce n’était pas la race blanche, ni le cocorico chauvin, ni la décadence des riches, ni une quelconque « identité nationale » qui étaient visés, encore moins une religion, c’était notre peuple si fécond, si joyeux et si divers. Ce n’est pas seulement une « nation » qui a été visée, c’est l’humanité entière qui est touchée. 

Ce n’est pas la France riche et austère thatchérienne, col serré, qui va à la messe le dimanche en famille, enfants auxquels on apprend à se mettre à genoux en uniforme. Alors que seulement 4,5 % des français vont ainsi à la messe. Mettre sur le même plan l’école privée avec la publique, va contre deux siècles d’histoire.

Fillon a voté contre la dépénalisation de l’homosexualité, contre le PACS, contre le mariage pour tous dans un pays ou mai 68 est une histoire sans fin, et où 63 % des citoyens se déclarent athées ou non religieux. Modifier la loi Taubira, cela lui a valu de gagner en rangs serrés la primaire de droite le 20 novembre, mais pas la majorité du pays les 23 avril et 7 mai prochains. 

Fillon se propose d’égorger la sécurité sociale, de supprimer la charte de l’environnement, de supprimer la durée légale du travail, de reculer la retraite à 65 ans (donc à 70 ans a taux plein), de rendre dégressive les allocations chômage, de supprimer 500 000 fonctionnaires, de passer aux 39 h sans augmentation de salaires, de réduire les budgets publics de 110 milliards, supprimer l’ISF, augmenter, baisser les cotisations sociales et els remplacer par une TVA augmentée de 2%, c’est à dire de heurter de plein fouet toutes les aspirations en profondeur manifestées par la société française depuis des décennies. 

En fait la France n’est pas du tout « en faillite », elle n’a jamais été aussi riche de son histoire et les richesses aussi mal redistribuées. Il y a eu 3,5 millions de manifestants contre Hollande, Valls et Macron pour avoir cassé le code du travail, Fillon annonce qu’il va continuer en pire, là encore il se heurte aux aspirations profondes du pays. 

Car si Hollande est discrédité c’est précisément parce qu’il est allé dans cette voie avec le CICE et la loi El Khomri : en aggravant la politique de hollande, Fillon aggrave l’agression contre la majorité écrasante des salariés qui produisent toutes les richesses et n’en reçoivent pas la part qu’ils méritent. 

Voilà pourquoi il peut ( et doit) être battu : pas par Hollande ou Valls, bien sur, mais par une gauche digne de ce nom et un programme de transformation sociale, allant exactement à l’inverse.

http://www.filoche.net/

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