mercredi 20 mars 2013

Notre Dame des Landes : lettre ouverte à Monsieur le Président de la Commission du dialogue par Geneviève Lebouteux, Christophe Dougé, Thérèse Leparoux, Bertrand Vrain, Gilles Denigot, Françoise Verchère et leurs collègues des premières rencontres


M. le Président, 
Nous nous sommes rencontrés pour la 4ème et dernière fois mercredi dernier 13 Mars, à votre demande. Nous souhaitons vous faire part de notre sentiment à la fin de ce long travail et vous poser les dernières questions que suscitent certains de vos propos ou nos derniers échanges. 

Même si vous nous avez affirmé ne pas savoir encore quelles recommandations votre commission allait proposer au gouvernement, vous avez dans le même temps donné votre point de vue très clairement en commentant l’article du Monde à la suite de votre interview: si vous avez des doutes sur la pertinence de certains arguments des porteurs de projet, (saturation de la piste, par exemple) vous n’en avez pas sur l’intérêt de ce nouvel équipement. 

La suite du débat a révélé ce qui serait probablement de nouveau mis en évidence dans votre rapport et que nous résumons un peu à la serpe, vous nous le pardonnerez : il est important en période de crise de penser à l’avenir. Les hommes d’affaires ont besoin d’aller partout en Europe dans la journée ; le départ de l’aéroport dégagera des potentialités d’urbanisation ; lorsque nous vous avons interrogé sur les raisons qui empêcheraient Nantes-Atlantique de répondre à cette demande, vous avez répondu bruit et sécurité. 


Sur la question environnementale, nous avons compris que vous n’étiez pas convaincu de la valeur du site de Notre Dame des Landes, que vous comparez curieusement avec le lac de Grandlieu dont vous pensez qu’il souffre de la présence de Nantes-Atlantique. 

En résumé, nous avons retrouvé un certain nombre d’arguments dont nous avions pensé vous avoir montré la faiblesse. 

Au début de notre travail, vous nous aviez affirmé vouloir « objectiver » le plus possible d’éléments dans un dossier devenu passionnel. Nous en étions très contents et avons travaillé en ce sens. Nous vous avons fourni beaucoup de documents, de chiffres, de cartes, et toujours donné nos sources. Vous comprendrez sans peine que nous attendions la validation ou la réfutation de nos arguments, chiffres, cartes, et sources à l’appui. 

Par exemple, Quels chiffres sur l’emploi sont-ils les plus conformes à la réalité ? 

Ceux de J.Auxiette : « En saison, à Nantes-Atlantique, entre 2 000 et 2 500 personnes travaillent sur la plateforme. Le nouvel aéroport permettant d’accueillir plus de passagers, on estime que l’effectif sera porté rapidement à 2 500-3 000 personnes. Des centaines d’emplois seront ainsi générés dès sa mise en service. Par la suite, plus le trafic sera important, plus la densité en emplois se renforcera. Les grands aéroports sont générateurs d’emplois pérennes selon des ratios qui s’observent de façon quasi mécanique en Europe : chaque million de passagers crée environ 700 nouveaux emplois directs sur la plateforme. » ?

Ou les nôtres ? 1986 ETP (source chambre de commerce) pour 3,6M de voyageurs soit 551 ETP par million ; et pas d’accroissement proportionnel au trafic à cause de la recherche de productivité. (cf. étude précédente et celle du CETE en 2011). La rigueur impose de parler ou d’emplois (ETP) ou d’employés et de ne pas mélanger les deux pour les besoins de la cause. La rigueur impose aussi de ne pas majorer l’augmentation éventuelle des emplois. Quelles compagnies aériennes disent être prêtes à ouvrir de nouvelles lignes à Notre Dame des Landes mais pas à Nantes-Atlantique et pourquoi ? Quel est l’impact réel de l’actuel aéroport sur l’urbanisation de l’agglomération ? Quelle est la superficie exacte des espaces aujourd’hui inconstructibles à cause du PEB : pour le logement ? pour l’activité ? Quelle est la localisation des 600 ha soi-disant libérés pour le logement au coeur de l’agglomération ? Nos documents sont-ils faux ? 

Sur la zone D du PEB, dont certains pensent qu’elle induirait un coût supplémentaire en termes d’insonorisation, nous vous demandons de bien vouloir questionner officiellement l’ACNUSA, qui a confirmé publiquement lors de la réunion annuelle tenue en Préfecture le 14 décembre dernier l’absence de contraintes spécifiques et affirmé que cette zone se réduisait finalement à un rôle d’information auprès des habitants. 

Quelle analyse faites-vous des cartes de bruit qui montrent bien la prégnance du bruit routier sur la ville (source Nantes-Métropole) ? Comment concilier ce que disent eux-mêmes les porteurs de projet sur le progrès des avions avec cet argument du bruit qui deviendrait insupportable ? cf. le livre de J.Auxiette vantant l’avenir du trafic aérien et affirmant qu’il y aurait « une réduction progressive de la consommation de carburant et d’émissions de CO2 de 50%, d’émissions de NOx (oxydes d’azote) de 80% et du bruit perçu de 50% à horizon 2020. » L’aéroport de Nantes est-il le premier aéroport en termes de nuisances pour que cela justifie son déplacement mais pas celui de Toulouse ? (cf. 22 000 logements à insonoriser contre 1750 ici ; voir aussi la lettre récente du Préfet de Toulouse que nous vous avons remise) 

Quel est le nombre d’ « incidents » potentiellement dangereux identifiés à Nantes-Atlantique sur les dix dernières années, par rapport à d’autres aéroports français (Toulouse, Bordeaux ou Lyon par ex) ? 

Sur quels éléments scientifiques et objectifs appuierez-vous votre sentiment, déjà exposé le premier jour de nos rencontres que le lac de Grandlieu et ses oiseaux souffrent de la présence de l’aéroport ce qui contribuerait à justifier entre autres son déplacement, alors qu’aucun ornithologue ou scientifique n’a exposé cet argument à ce jour ? 

Nous avons bien conscience du travail important qui a été le vôtre, nous vous réitérons volontiers nos remerciements pour votre écoute attentive mais vous comprendrez que nous ne puissions accepter de nous retrouver à la fin des ces longs mois sans clarification entre ce qui relève dans ce dossier de la vérité et des faits et ce qui relève de l’opinion ou du pari. Il nous semble que les travaux de votre commission seraient d’ailleurs sujets à fortes critiques si vous ne pouviez faire cette différence. 

Nous avons été écoutés fort attentivement, serons-nous entendus sur cette demande d’objectivation ? Nous l’espérons encore, et dans cette attente, nous vous prions Monsieur le Président de croire à nos salutations les meilleures, 

Geneviève Lebouteux, Christophe Dougé, Thérèse Leparoux, Bertrand Vrain, Gilles Denigot, Françoise Verchère et leurs collègues des premières rencontres.

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