"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
mercredi 1 avril 2015
Hommage à Roger Tual
Dernier survivant du groupe résistant internationaliste Front Ouvrier, le couëronnais Roger Tual vient de mourir. Il avait 97 ans.
Jeune ouvrier, Roger avait adhéré aux Jeunesses Socialistes, animées par la Gauche Révolutionnaire, puis au PSOP (Parti Socialiste Ouvrier et Paysan) de Marceau Pivert lors de l’exclusion du courant gauche de la SFIO. Et c’est toujours avec émotion et fierté qu’il se rappelait les rassemblements à Couëron lors du Front Populaire où les Jeunesses Socialistes, en uniforme et chantant les chants révolutionnaires, assuraient le service d’ordre des manifestations. Ainsi que des deux cents journaux vendus par les militant-es sur la seule ville de Couëron.
Lors de l’invasion allemande, le PSOP, interdit et pourchassé, allait littéralement disparaître de la scène politique. C’est par le biais des auberges de jeunesse, où il allait rencontrer des militant-es trostkystes de la IVème Internationale, dont Yvan Craipeau, que Roger allait rejoindre les Comités pour la IVème internationale puis le Parti Ouvrier Internationaliste.
Localement, ce petit groupe, évidemment clandestin et composé de très jeunes militants, allait réussir non seulement à maintenir le lien avec la direction du parti et assurer la diffusion du journal clandestin La Vérité, mais à développer une intervention politique au sein de plusieurs entreprises de Nantes et de la Basse Loire.
La publication du bulletin Front ouvrier, « organe clandestin des ouvriers de la région Atlantique » à plusieurs centaines puis milliers d’exemplaires à partir de l’été 1943 allait concrétiser cette activité résistante. C’est à Couëron que ce bulletin était ronéotypé par Roger et ses camarades.
L’assassinat par les nazis de son ami Robert Cruau le 6 octobre 1943 à Brest, ville où le POI avait débuté un prometteur travail politique en direction des soldats allemands et l’arrestation de la majorité du groupe, dont le rezéen Georges Berthomé qui mourra en déportation, portera un coup très dur à l’activité locale du groupe Front Ouvrier, sans toutefois parvenir à la réduire.
Roger Tual, présent à l’hommage rendu à son ami Robert Cruau (« culotte ») le 5 octobre 2013 au cimetière de la Chauvinière à Nantes, se rappelait parfaitement ces années de résistance, enthousiastes et angoissantes. Ainsi que la dizaine de dirigeants trotskystes qu’il avait accueillie et camouflée dans les marais de Couëron.
Bien que surveillé et plusieurs fois contrôlé par les gendarmes de Couëron, Roger resta un résistant actif, militant du POI, devenu Parti communiste Internationaliste en 1944, jusqu’à la capitulation nazis.
A la libération, il continua de militer activement et, au côté de Serge Tuaude, conduisit la liste du PCI aux législatives de novembre 1946. Parmi les huit candidats de la liste PCI, le rezéen Paul Etrillard qui restera jusqu’au bout son ami et avec qui il partagera le même parcours politique.
Calomnié et même pourchassé par les militants locaux du PCF - pas facile dans une petite ville où tout le monde se connaissait -, Roger aimait raconter le plaisir qu’il avait eu de peindre, littéralement au nez et à la barbe de ses pourfendeurs staliniens qui défendaient la pause sociale pour reconstruire le pays, « échelle mobile des salaires » au coaltar sur la piste du vélodrome de Couëron la veille d’une compétition. « Fallait voir leurs têtes quand le public a rejoint les tribunes ».
Au début des années 1950, et au sortir d’un congrès où les différentes fractions s’étaient affrontées avec violence, Roger Tual et son ami Paul Etrillard décidaient de quitter le mouvement IVème internationale, tout en restant localement des militants engagés. Ils allaient bien plus tard rejoindre le PSU et Roger devenir conseiller municipal de Couëron.
Roger Tual allait également accompagner Paul Etrillard dans les premiers mouvements de défense de la nature, bien avant que l’écologie ne devienne un enjeu politique à part entière.
Artisan ébéniste (« je n’aimais pas les patrons, alors », plaisantait-il encore récemment ), artiste à ses heures, Roger Tual était un homme intègre et chaleureux, qui aimait et savait accueillir.
Jusqu’à la fin de sa vie, il est resté fidèle à ses engagements de jeunesse, toujours en quête d’humanité et d’émancipation.
Salut Roger.
François Préneau
PS) regrettons cependant que les archives dont il avait fait don à la mairie de Couëron aient été égarées.
- Les obsèques de Roger Tual auront lieu au crématorium du cimetière parc à Nantes samedi matin à 10h15
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