"Nous ne sommes pas du côté de la loi, mais de celui de la révolte !" Asli Erdogan
samedi 10 mai 2014
"Label rouge" ? - par Jean Jacques Boislaroussie
Le Front de Gauche est en capacité d'impulser quelques manifestations nationales, deux pas an en moyenne, de maintenir à l'occasion des échéances électorales nationales un espace significatif à gauche du PS, mais n'est pas réellement enraciné dans la société. Seulement un "label rouge" ?
Cette situation renvoie a un contexte qui dépasse largement ses limites et les contradictions entre PCF et PG en son sein. L'évolution des anciens partis sociaux-démocrates impose une mise à jour stratégique fondamentale. Elle nécessite une démarcation franche avec le PS, mais ne peut s'y résumer. Les élections municipales ont en effet démontré l'absence de relation mécaniste entre recul du PS et progrès de la gauche de gauche, notamment du Front de gauche.
La mutation du capitalisme induit des phénomènes profonds de désagrégation sociale, rend illusoire la reconduction des anciens compromis sociaux-démocrates inscrits dans des cadres nationaux, nécessite de ne plus considérer les questions écologiques comme périphériques.
La formidable bataille idéologique engagé par les dominants pour imposer le chacun pour soi et la marchandisation de nos vies comme seul horizon implique une réponse globale qui ne peut se limiter à la dénonciation de l'austérité. Une alternative doit être portée, articulée autour d'un nouveau partage des richesses, de l'appropriation sociale, de la réduction du temps de travail, d'une démocratie active, de l'extension de la sphère de la gratuité au détriment des consommations aliénantes.
Quelles que puissent être les limites du Front de Gauche, il est un élément fort de résistance à une normalisation du champ politique qui laisserait le champ libre aux alternances entre une droite et un centre-gauche en accord sur l'essentiel, seulement contestés par l'extrême droite.
L'hypothèse de sa transformation en organisation politique commune est, dans les conditions présentes, illusoire. En revanche, contribuer a lui donner une vraie assise par l'intermédiaire de collectifs de base, durables ou constitués autour d'échéances politiques , est nécessaire. De tels collectifs ont vocation a permettre l'échange et la co-élaboration entre militantes des diverses organisations du Front, mais aussi avec un secteur plus large, fortement politisé mais ne souhaitant pas s'engager dans une des composantes.
L'objectif est de reconstruire des cadres de travail en confiance, mais surtout des pratiques politiques et un projet de rupture et d'alternative. Les interactions nouvelles entre le social et le politique sont plus faciles à proclamer qu'à inventer.
La permanence de cadres larges de débat et d'action hors des temps forts de grève et de mobilisations sociales, écologistes, sociétales, ne va pas de soi. Les divers mouvements "indignés" n'échappent pas à ce constat.
Cependant, à une échelle encore modeste, des mobilisations comme celle du 12 avril contre l'austérité ont manifesté une certaine capacité de forces politiques à construire sur un pied d'égalité avec des secteurs associatifs et syndicaux, et la capacité de ces secteurs à assumer des convergences politico-sociales.
Il est indispensable de progresser dans cette voie dans la durée et qualitativement. Dans la durée en dépassant la logique du "saut de puces", de manifestation nationale en journée d'action, en construisant des processus combinant initiatives locales et régionales et temps forts de convergence. Qualitativement en construisant un réel processus de discussion et d'élaboration.
Ce processus doit concerner toutes les forces engagées dans le Front de Gauche mais ne peut s'y enfermer. L'apport syndical et associatif est indispensable. L'est aussi celui des secteurs politiques pouvant prendre leurs distances, au sein du PS comme d'EELV, avec la dérive au centre de Hollande et Valls. Enfin, quelle que puisse être la faiblesse des secteurs en expérimentation sociale et alternative, écologiste ou autogestionnaire, ou d'extrême gauche et libertaires ouverts au débat, ils seront aussi utiles pour construire un processus unitaire large.
Jean-Jacques Boislaroussie
in Rouge & Vert
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