dimanche 18 janvier 2015

Europe : alternative ou barbarie, par Julien Douillard


Le 1er janvier 2015, la Lituanie a été le 19ème pays de l’Union européenne à adopter l’euro. Sans flonflon. Ereintés par les programmes d’austérité successifs, de réformes structurelles en réformes structurelles, avec aujourd’hui un salaire minimum fixé à 290 euros/mois et un salaire moyen aux environs de 500 euros, une majorité des lituaniens considère déjà à juste titre qu’elle n’en a rien de bon à attendre. 

Avec plus de 25 millions de chômeurs – chiffres de la Confédération européenne des syndicats décembre 2014 -, l’Union européenne ne cesse de s’enfoncer dans la crise. Et l’annonce par Junker de 315 milliards d’investissements (supplémentaires et théoriques) sur trois ans sensés « relancer la croissance » n’y changera rien. Car l’UE est avant tout malade de ses propres choix politiques qui conduisent à une explosion des inégalités et à des atteintes et menaces pour l’environnement à un niveau jamais atteint, au bénéfice exclusif d’élites vivant dans un univers mondialisé inaccessible, économiquement et culturellement, au peuple. 


Les dirigeants politiques de droite et socio-démocrates, électoralement concurrents mais unis, y compris pour gouverner, dans une même soumission à la « modernisation » capitaliste et à ses mentors FMI, BCE et UE, (« Simplifier la vie des entreprises pour redresser la compétitivité », thèmes ressassé en France par Hollande et Valls et qui se traduisent par le pacte de compétitivité et la loi Macron) nourrissent un rejet et une crise politique sans précédent au niveau des 28 pays membres de l’UE. 

Faute d’alternative progressiste et solidaire, outre l’explosion de l’abstention, se libèrent alors, sur fond de quête identitaire, d’antisémitisme et de racisme antimusulmans, des espaces nauséabonds où l’extrême-droite prospère et tisse des passerelles multiples avec la société toute entière. 

Au point de postuler au pouvoir, comme c’est le cas avec « notre » Front National ou avec le Parti du Peuple au Danemark. Délitement et misère sociale, repli identitaire et violence raciale d’un côté, solidarité, égalité et fraternité de l’autre : qu’est-ce que sera demain, le début ou la fin ? Pour partie, la réponse nous appartient. 

Et c’est pourquoi il est si important de porter nos regards – et notre solidarité – vers la Grèce et l’Espagne, vers Syriza et Podemos. Dans ces deux pays particulièrement frappés par les contre-réformes diligentées par Bruxelles et la Commission européenne et mis en œuvre par leurs interchangeables gouvernants, droite et PS, la colère s’est traduite en résistance de masse, largement auto-organisée, qui a porté la montée de la Coalition de la gauche radicale (Syriza) en Grèce et du mouvement altermondialiste Podemos dans l’Etat espagnol - avec son manifeste « Prendre les choses en main : convertir l'indignation en changement politique». Au point, là encore mais à gauche cette fois, de postuler également au pouvoir. 

Syriza comme Podemos sont des mouvements jeunes, des fronts, souvent hétérogènes, où le débat est vif, avec des liens historiques, culturels et politiques nombreux avec le « vieux » mouvement ouvrier (l’appartenance de leurs élus européen au Parti de la Gauche Européenne en est le signe) mais aussi d’importantes ruptures, dans la foulée du mouvement des indignés et de la reprise des entreprises en autogestion, qui ont su rassembler des dizaines de milliers de militant-es, notamment dans la jeunesse, et redonner l’espoir à leurs peuples. L’échéance électorale du 25 janvier prochain en Grèce a une importance bien au-delà de ce pays. 

Une victoire de Syriza ouvrirait (ouvrira) un changement dans tous les domaines « qui exige et impose un conflit avec des intérêts puissants » comme l’a réaffirmé Alexis Tsipras au lendemain de l’échec de la candidature de Dimas à la présidence du pays. « Un conflit », aussi « avec des politiques et des milieux qui considèrent que notre souveraineté est limitée ou négociable ». Ce « conflit » est déjà une hostilité affirmée et une guerre ouverte contre ces mouvements et leurs leaders, à qui rien ne sera épargnée. 

 Les dirigeants de l’Union européenne, et les capitalistes qu’ils servent et soutiennent, mobilisent ainsi tous leurs moyens politiques et médiatiques pour discréditer par le chantage et la peur et tenter de bloquer la montée de la coordination de la gauche radicale - acronyme de Syriza - et d’empêcher sa victoire électorale. Comme elle fera demain pour déstabiliser un futur gouvernement Syriza et le forcer à passer sous ses fourches caudines. 

Avec l’extrême-droite aux aguets - une extrême droite ouvertement néo-nazi en Grèce avec Aube Dorée, fortement présente dans la police et l’armée - et prête à jouer son rôle de chien de garde du capital en multipliant provocations et violences. 

Rien n’est donc gagné, pas même les élections du 25 janvier prochain en Grèce, mais, avec Syriza et Podemos, un vent nouveau se lève sur l’Europe, porté par les nouvelles générations. Il conforte les résistances populaires et solidaires, les expérimentations autogestionnaires, et, articulant mobilisations sociales, convergence politique et dynamique électorale, il est désormais l’espoir de tout un peuple et de sa jeunesse. Notre espoir. Notre combat. 

Julien Douillard- Rouge et Vert janvier 2015

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